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vait des articles politiques dans un journal de province, ne pouvait manquer d’en écrire plus tard, de plus amples et de plus mûris, dans des Revues parisiennes. C’était là d’ailleurs le prolongement naturel, l’aboutissement presque nécessaire, sinon de toute son œuvre antérieure, tout au moins de la partie la plus forte, la plus grave et la plus méditée de son œuvre antérieure. Déjà, nous l’avons indiqué, dans son Dix-huitième siècle, dans son Seizième siècle aussi, dans ses Politiques et Moralistes du XIXe siècle, il ne se contente pas d’analyser et de résumer les systèmes de politique ou de morale qui s’offrent à son examen ; il les critique, il les discute ; incidemment, et particulièrement dans ses Préfaces, nous venons de le voir, il donne librement son avis, soit sur des points de détail, soit même sur d’assez importantes questions actuelles. Il n’était pas besoin d’être fort perspicace pour deviner que sa pensée était comme hantée par le problème politique et social, et que ce problème, un jour ou l’autre, il l’aborderait directement. Ce jour ne tarda pas à arriver. En 1899, paraissait un premier volume de Questions politiques, simple recueil d’articles dont les plus anciens étaient datés de 1897. Ce volume fut suivi de plusieurs autres : Problèmes politiques du temps présent, la Politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire, le Libéralisme, l’Anticléricalisme, le Socialisme en 1907, le Pacifisme, Discussions politiques. À l’aide de ces sept ou huit volumes, on peut caractériser, dans leurs lignes générales, les conceptions politiques de M. Faguet.

Comme les études littéraires sur le Dix-huitième siècle, ces études politiques et sociales paraissaient bien à leur heure. Depuis une dizaine d’années, — il est devenu banal de le constater, — la vie intérieure du pays traverse une crise qui n’est peut-être pas près d’être terminée, et dont il est bien difiicile, tant est confuse la mêlée des intérêts et des doctrines, de prévoir ce qui pourra sortir. Quel sera le sort des multiples expériences que les partis au pouvoir tentent tumultueusement tous les jours ? Quelle en sera la répercussion sur notre politique extérieure, et la place que nous occupons dans le monde en sera-t-elle accrue "ou diminuée ? Vers quelles destinées, glorieuses, médiocres ou obscures, la France d’aujourd’hui s’acheminet-elle fiévreusement ? La question est de celles que ne se pose pas sans angoisse tout esprit réfléchi et sincère ; et l’on conçoit sans