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d’abord ses abonnés parisiens : les comtes de Lamarcq et de Tessin, le duc de Valentinois, les princes de Lichtenstein, de Campo-Florido et de Grimberghen ; le marquis de Fontanges et M. de Joinville. En province : le duc d’Agenois à Montpellier, M. de Spon à Lyon et le marquis de Choiseul à Lunéville ; à Florence, M. de Richecourt, M. de Bucquoy à Bruxelles, à Amsterdam M. de Médina. Gautier adresse encore ses feuilles du jeudi et du samedi à M. de Chambrier, ministre de Prusse, à la princesse de la Tour et au prince de Ligne, au président de Brosses, au chevalier de Launey, à M. de Romigny, à l’abbé de Chevreuse, au comte de Loc-Maria. Séchelles, intendant de Lille, constate que les nouvelles à la main pénètrent dans tous les châteaux. Au fait, le prix de l’abonnement était si élevé que seules les personnes du plus haut rang pouvaient avoir un intérêt assez pressant à recevoir ces informations pour les payer aussi cher.

Le prix de cet abonnement était moyennement de 144 livres par an, soit quatre ou cinq cents francs de notre monnaie. Les nouvellistes de second ordre acceptaient des souscriptions à trois livres par mois. Leclerc et Châtelain donnent leurs gazetins pour une rétribution mensuelle de 20 et 30 sols (ce qui représenterait aujourd’hui un abonnement annuel de 72 francs) ; mais c’étaient des gâte-métier. « Je lui dis, déclare Nervèze, qu’il avait tort de donner ses nouvelles à si bon marché. Leclerc me répondit que chacun faisait comme il l’entendait. » D’autre part, nous voyons des abonnemens monter jusqu’à 600 livres par an, environ deux mille francs d’aujourd’hui.

Le nombre de ces souscripteurs était très variable. Quelques nouvellistes n’en avaient que cinq ou six ; d’autres cent cinquante ou deux cents.

Quand la gazette était terminée, des distributeurs la portaient à la clientèle de Paris : opération qui exigeait des précautions infinies. Les femmes étaient choisies de préférence pour cette tâche dangereuse. Quelquefois, c’est le chef de nouvelles en personne qui, le matin, à l’heure consacrée à la toilette, va remettre la feuille, fraîchement écrite, à l’abonné de considération :

« La toilette de l’homme du jour ressemble à une boutique de parfumeur par les odeurs différentes. Elle est parée comme une châsse découverte et décorée de pommades de frangipane et de persil, d’ambre, de vanille, de tubéreuse, de jasmin, de