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de forts détachés. Très grande chaleur, beaucoup de poussière, route large et fort belle. Pas beaucoup de chariots ni de mouvemens de troupes.

Arrivé à la porte de Vérone à quatre heures et quart, on me laissa passer d’abord sans difficulté, mais, à quelques dizaines de pas, l’officier de garde courut après ma voiture et me demanda qui j’étais et où j’allais. Je lui répondis que j’étais général français envoyé en parlementaire auprès de l’empereur d’Autriche. L’officier répondit qu’il avait pour consigne de faire accompagner les parlementaires, et il donna l’ordre à quatre soldats bohèmes d’accompagner et de diriger ma voiture jusqu’au palais de l’Empereur.

A quatre heures et demie, j’arrivais dans la cour du grand quartier général autrichien. C’est une maison assez simple, à peu de distance à gauche des anciennes Arènes, ancienne habitation du maréchal Radetzki.

Je descendis sous le vestibule, tout le monde était à dîner. Un aide de camp de service, que j’ai su plus tard être le prince de Hohenlohe, vint me recevoir. Je lui dis que je désirais voir l’empereur d’Autriche, ayant une mission auprès de lui de la part de l’empereur des Français.

Au bout de quelques minutes, pendant lesquelles j’observai une certaine émotion et de l’étonnement au quartier général, on me fit monter au premier étage dans un petit salon dans lequel vint me recevoir un général, que j’ai su depuis être le comte de Grühne. Il me dit qu’il allait prévenir l’Empereur qui me recevrait immédiatement.

Au bout de quelques instans en effet, arriva un jeune homme, grand, mince, très blond, avec de petites moustaches, vêtu d’une petite tunique bleu-gris à deux rangées de boutons, pantalon en toile grise ; c’était l’empereur François-Joseph. Il me prit la main avec assez d’affabilité et d’aisance, disant qu’il était enchanté de me voir et me conduisit dans son cabinet qui forme le coin, après avoir traversé un second salon.

Là, il s’assit à son bureau et je m’assis du petit côté de la même table à droite. Je lui remis la lettre de l’Empereur. En la lisant attentivement, je crus deviner, sur la figure de l’empereur d’Autriche, un sentiment de satisfaction, mais, en même temps d’assez grand embarras. « Je suis enchanté, me dit-il, que l’empereur Napoléon accepte ma proposition de paix, mais j’ai