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mieux organisée et la mieux outillée de toutes les écoles de l’Alliance en Orient. Outre l’enseignement professionnel, l’enseignement primaire à tous ses degrés y est distribué à des élèves de toute nationalité et de toute confession. Naturellement, on commença par une promenade à travers les classes, les dortoirs et les réfectoires, qui étaient parfaitement tenus. On me mit en main des copies qui étaient fort honorables, on interrogea devant moi des jeunes gens qui répondirent fort bien. Faut-il répéter que je n’attribue pas une importance extrême à ces formalités ? Qu’un maître fasse une leçon brillante devant un inspecteur, qu’un élève réponde bien ou mal, cela ne prouve pas grand’chose. Je m’en rapporte, sans hésiter, à la bonne réputation dont l’école jouit dans toute la Palestine et à l’agréable souvenir que j’ai gardé de mes conversations avec les professeurs (il en est de chrétiens dans le nombre). Ceux avec qui j’ai causé m’ont paru des esprits très ouverts, très modernes, — trop modernes peut-être.

Mais ce qui me frappa et m’intéressa le plus, ce sont les ateliers où on initie de jeunes Orientaux au travail industriel européen. Les ressources pécuniaires dont l’établissement dispose ont permis de les installer avec un grand luxe. Il y a des salles de tissage, de moulage, de serrurerie. Il y a des cours de dessin et de sculpture ou de peinture décorative. Il y a des ateliers de teinturerie, d’autres où l’on fabrique des résilles de cheveux. J’aperçois des apprentis mécaniciens en bourgerons bleus et cottes de travail. On m’assure que leurs pièces se vendent déjà dans la région et l’on escompte le moment où l’on pourra se passer complètement des fournitures d’Europe. J’examine de plus près les auteurs de ces merveilles. Certains sont roses et blonds, d’un blond pâle d’albinos : ce sont des Juifs du Nord, des immigrans polonais, aussi dissemblables qu’il est possible, comme types et comme allures, de leurs coreligionnaires du Sud, Égyptiens ou Tripolitains. On me signale aussi quelques Chrétiens dans cette foule d’élèves cosmopolites. Mais la majorité est orientale : c’est ce qui rend si intéressant l’effort tenté, dans cette maison, par l’Alliance israélite. Les jeunes Juifs de là-bas, comme d’ailleurs tous leurs compatriotes, n’ont qu’un goût médiocre pour le travail manuel. Parviendra-t-on à le leur inculquer ? La tâche, évidemment, sera longue et difficile. Ce qu’il y a de sûr, c’est que rien ne saurait être plus profitable et plus salutaire à ces jeunes gens qu’un enseignement