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faculté de le dénoncer. S’il ne l’a pas été, c’est parce qu’on craint encore davantage les conséquences d’une guerre fiscale entre les colonies.

Les législations concernant les indigènes sont partout dissemblables, et les quatre colonies ayant des besoins différens de main-d’œuvre, n’étant pas séparées les unes des autres par des frontières naturelles faciles à surveiller, les conflits à ce sujet sont presque permanens. Plus ils se renouvellent, et plus la négociation des ententes devient épineuse. Cependant les industries sollicitent en vain un peu de stabilité quant aux moyens de se procurer la main-d’œuvre indispensable ; et les natifs, de leur côté, se plaignent du régime capricieux auquel ils sont obligés de se soumettre. Quand les protestations deviennent trop vives, il faut bien qu’une autorité intervienne pour établir au moins quelque modus vivendi provisoire. En l’absence d’un gouvernement central, cette autorité ne peut être que celle de la mère patrie. Sur ce point, lord Selborne concluait : « L’intervention venant du dehors dans les affaires d’une colonie est la négation même du principe de self government qu’on a voulu introduire dans ce pays. Alors même qu’elle est nécessaire pour prévenir des dangers imminens, elle tend à accroître l’incertitude dans les conditions d’existence de la colonie et fait douter de son avenir. Au surplus, les résultats de ce système sont assez mis en évidence par les discussions stériles, les erreurs administratives, les pertes de force et d’activité, enfin par l’arrêt du développement général, dans un pays doué de ressources merveilleuses, habité par une population énergique et entreprenante. »

La publication du memorandum de lord Selborne donna une nouvelle impulsion au mouvement fédératif. Jusqu’au fond des campagnes, l’attention fut éveillée par des discours, brochures, articles de journaux, émanant de personnalités en vue. Puis se constituèrent des associations libres (Closer union societies) formées sans distinction de partis, lesquelles, dans les quatre colonies, réunirent et publièrent les renseignemens indispensables à l’examen des problèmes posés par la question fédérale, à leurs relations, à la démonstration des avantages de l’union et à la possibilité d’y atteindre. Ainsi l’opinion publique se dégagea par degrés de la considération exclusive des intérêts locaux pour s’élever à la conception de l’unité nationale.

Avant de toucher le but, on avait à franchir plusieurs étapes