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construire dans leurs établissemens ou en commander dans l’industrie privée. L’intérêt de la question n’était mise en doute par personne.

Tout le monde se rappelle le voyage du dirigeable Patrie de Paris à son port d’attache de Verdun. On sait aussi comment cette première unité pour ainsi dire réglementaire de notre flotte aérienne fut perdue à la suite d’une bourrasque. Mais ce n’était qu’une perte matérielle ; la Patrie fut bientôt remplacée par la Ville de Paris, et l’accident fut oublié.


III

Telle était la situation vers le commencement de 1907. À partir de cette époque nous vécûmes dans la persuasion que notre flotte aérienne irait en se développant progressivement et que nous pourrions maintenir notre avance sur les étrangers. Nous savions bien qu’en Allemagne on ne restait pas inactif, et les essais des immenses dirigeables à carcasse métallique du comte Zeppelin ne pouvaient pas passer inaperçus ; mais nous considérions, avec raison d’ailleurs à mon avis, que ce système de construction lourd, coûteux et encombrant ne devait pas être imité. Nous plaisantions volontiers ce colossal aéronef qui n’osait jamais s’écarter du lac de Constance, et prendre le contact du sol ; et nous étions bien persuadés que les dirigeables français valaient mieux que ceux de nos voisins.

Nous avions du reste le plaisir de constater à intervalles assez rapprochés l’apparition de nouvelles unités. La République, le Clément-Bayard évoluaient de temps à autre d’une manière satisfaisante. En Allemagne, outre les ballons Zeppelin, on construisait des dirigeables d’un modèle différent, tels que ceux de Gross ou de Parseval ; mais, nous nous en inquiétions d’autant moins que, parfois, un accident retentissant nous permettait de souligner l’infériorité de nos émules.

Du commencement de 1907 jusque vers le milieu de 1909, nous nous intéressions certainement aux dirigeables, nous constations avec satisfaction l’accroissement et les progrès continus de notre flotte aérienne, mais ce n’était pas pour l’opinion publique française une préoccupation intense.

Un événement inattendu vint, d’ailleurs, détourner l’attention du grand public. De tous temps, le système du plus lourd que