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imposait, il avait donné satisfaction, qu’il ne s’expliquait pas ce changement des volontés souveraines. Bismarck riposta, le 16, que les adjonctions dont Krementz avait accompagné ses déclarations soumises les rendaient insuffisantes, et qu’un aveu de culpabilité, portant sur sa conduite passée, couperait court à d’interminables embarras. Krementz, relisant la lettre impériale du 2, remontra au chancelier, le 20 septembre, que Sa Majesté, tout au contraire, avait laissé voir l’intention d’arranger elle-même les difficultés sans exiger aucune résipiscence. « Je ne corresponds plus avec vous, » répliqua Bismarck ; et ce qu’il voulait, c’était qu’à l’avenir, l’Etat ne reconnût plus Krementz comme évêque. Mais les irréparables rigueurs n’étaient pas du goût de Guillaume ; et l’on se contenta d’un arrêté signé Falk, par lequel étaient supprimés les subsides budgétaires annuellement accordés à l’évêque d’Ermeland. Sans jugement, l’Etat suspendait une dotation que les engagemens conclus avec Rome en 1821 l’astreignaient à maintenir. En Belgique, des souscriptions s’ouvrirent pour le prélat : Bismarck dut y voir une preuve nouvelle de la conspiration ultramontaine internationale, complice de Krementz.

D’autres complices se déclaraient, s’affichaient en pleine terre allemande : c’étaient tous les évêques allemands. À cette même date du 20 septembre, à laquelle Krementz expédiait à Bismarck une suprême fin de non-recevoir, ils étaient tous réunis ou représentés à Fulda, autour du tombeau de saint Boniface, et, de là, adressaient aux catholiques de l’Empire une lettre collective pour protester contre les lois récentes, et pour se solidariser nettement avec leur collègue de l’Ermeland. « C’est votre faute à vous, leur ripostait la Correspondance provinciale, organe officieux du chancelier ; au Concile, naguère, vous aviez prévu, comme conséquences politiques de la définition, les troubles dont à présent vous faites un grief à l’État. Tant pis pour vous, messeigneurs, pourquoi vous êtes-vous soumis ? ». Et la Correspondance insinuait que tout évêque belliqueux, ou violateur de la loi civile, était assuré, quel qu’il fût et quoi qu’il fît, de voir se resserrer autour de lui tout l’épiscopat de l’Empire.

Mais voici que, parmi les protestans eux-mêmes, la conspiration ultramontaine internationale, si gratuitement soupçonnée par Bismarck, semblait recruter des agens. Louis de Gerlach, l’ancien ami du chancelier, l’ancien rédacteur de la Gazette de