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ministère de l’Instruction publique. L’instruction n’existe sérieusement que là où les étrangers ou les chrétiens sujets ottomans ont créé des écoles. Dans le vilayet de Salonique, celui où l’instruction est le plus répandue et d’où sont sortis les hommes du risorgimento, le nombre donné par l’administration, comme étant celui des élèves fréquentant les écoles officielles est d’un peu moins de 14 000 enfans, — chiffre vraisemblablement exagéré, — tandis que les élèves des écoles des nationalités (Bulgares, Serbes, Grecs, Valaques) sont 89 000. Sans l’instruction répandue par ces écoles, par les écoles françaises et par celles de l’alliance israélite, on peut dire que la révolution ne se serait pas faite. N’est-il pas étonnant, dans ces conditions, de voir l’autorité ottomane s’attaquer, par toute sorte de moyens, à l’enseignement des nationalités ? Le directeur de l’Instruction publique du vilayet envoie des inspecteurs dans les écoles, ce qui est légitime et ce qui a toujours été accepté sans difficultés par les Bulgares et les Serbes, et admis en fait par les Grecs ; mais aujourd’hui ces inspecteurs refusent d’entrer en relation avec les autorités ecclésiastiques dont dépendent les instituteurs ; ils exigent que ceux-ci leur donnent directement tous les renseignemens : de là des conflits dont l’autorité profite pour faire fermer les écoles. On interdit au patriarcat et à l’exarchat d’avoir, de leur côté, des inspecteurs techniques ; dans certaines localités du sandjak de Serrès, les agens du gouvernement se sont emparés des écoles bulgares et y ont installé des instituteurs choisis par eux. L’idée peut être juste, mais non pas le procédé. La solution à laquelle on finira par s’arrêter sera probablement celle-ci : l’État entretiendra lui-même, dans les villages non turcs, des écoles où l’enseignement sera donné dans la langue maternelle des habitans, comme cela se pratique en Belgique, en Autriche et dans les cantons mixtes de la Suisse. La loi sur l’instruction publique prévoit cette mesure, mais elle n’a jamais été appliquée ; elle ne peut l’être avec succès que dans les pays où l’État est assez impartial pour donner confiance aux nationalités. Pour le moment, le procédé le plus sage et le plus libéral serait que l’État subventionnât les écoles des communautés non turques ; on l’a fait, d’ailleurs, mais la répartition et la distribution des subventions se sont opérées de la façon la plus arbitraire. Ainsi, par une application défectueuse, les dispositions les meilleures sont