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toujours marché d’accord, réglant leur pas les unes sur celui des autres et sachant, au besoin, faire des sacrifices pour maintenir l’action commune. Quand on a su qu’à Potsdam la Russie avait apporté un programme d’action séparée, on s’est naturellement demandé ce que devenaient les intérêts des deux autres puissances. Nous aimons à croire qu’au moment où M. Sasonoff a mis au courant les ambassadeurs français et anglais des projets avec lesquels il s’apprêtait à partir pour Potsdam, on s’est préoccupé aussitôt, à Paris et à Londres, de rétablir l’action commune, soit de faire face à une situation nouvelle où l’action franco-anglaise pouvait se trouver affaiblie. Sur ce point particulier, aucune question n’a été posée à Paris. A Londres, au contraire, le gouvernement a été interrogé dès le premier jour de la session. Lord Lamington a même été très pressant. Admettant que le gouvernement britannique avait été mis au fait des projets russes, il a demandé quelle était la nature de ces projets, quelle avait été l’attitude de la Russie à Potsdam, en quoi les intérêts anglais en Mésopotamie et en Perse pouvaient en être affectés. La question a été précise ; la réponse l’a été moins. « Des négociations, a déclaré lord Morley, sont pendantes entre la Russie et l’Allemagne : il faut en attendre le terme. En ce qui touche les intérêts anglais enjeu, il est impossible de dire s’ils sont affectés et dans quelle mesure ils le sont, tant que les négociations n’auront pas abouti. En attendant, je puis assurer que les intérêts anglais sont très étroitement surveillés, et que le gouvernement russe est pleinement informé de nos vues. » Lord Lamington a insisté. « Dois-je entendre, a-t-il demandé, que notre gouvernement est tenu pleinement informé par le gouvernement russe du résultat de son échange de vues avec l’Allemagne ? C’est la substance de ma question. » Lord Morley a répliqué que, pour le moment, il ne pouvait rien ajouter à ce qu’il avait déjà dit, mais ce qu’il avait dit est important. Il résulte, en effet, de ses paroles que le gouvernement anglais tient le gouvernement russe « pleinement informé de ses vues. » Si la même question avait été posée à M. Pichon, sa réponse aurait sans doute été la même. Le gouvernement russe est informé de nos vues comme il l’est de celles du gouvernement anglais, et nous aimons à croire qu’il en tient compte.

L’accord entre les trois puissances est en effet plus indispensable que jamais. Il résulte d’ailleurs des paroles de M. Pichon, comme de celles des ministres anglais, que la confiance entre elles est toujours la même. S’il y a eu des négligences de détail, si, dans l’entraînement