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LE POUVOIR POLITIQUE
DE
LA COURONNE ANGLAISE

L’EXEMPLE DE LA REINE VICTORIA

Depuis peu de jours, dans une salle écartée de Westminster, siège un tribunal archaïque. Il est présidé par le duc de Norfolk. Les juges examinent les titres que font valoir, par l’intermédiaire d’hommes de loi, les descendans des familles historiques, désireux de jouer un rôle dans la cérémonie du couronnement. Qui aura le droit de porter l’épée d’Etat, de brandir l’étendard royal, de déposer sur un coussin les éperons d’or ? Et la presse anglaise reproduit, sans sourciller, les décisions de la Court of Claims. L’ouverture du Parlement s’est déroulée avec le cérémonial consacré. Les mêmes chevaux ont traîné le même carrosse. Pas un des officians, pas un des objets, fixés par de séculaires coutumes, n’a été oublié.

Le cadre, le décor sont entretenus avec une piété et un goût dont l’Angleterre a le secret. Mais ils ne parviennent pas à masquer la gravité de la crise, qui transforme la Grande-Bretagne. Au dedans, les Lords et les Communes échangent des coups décisifs. Au dehors, l’armature impériale craque sous la poussée formidable des nationalismes coloniaux. Le Canada, déjà rebelle au projet d’armemens maritimes, voit, dans le traité de commerce avec les États-Unis, l’échec définitif des tarifs différentiels, à l’aide desquels Joe Chamberlain espérait resserrer l’unité