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même les bouchers, enfin en détruisant un certain nombre d’objets alimentaires, sans se douter qu’elles en augmentent encore la rareté et par conséquent le prix. Le mal grandit, se propage ; la troupe intervient enfin pour rétablir l’ordre ; mais elle le fait trop tard, quand beaucoup de dégâts ont été commis et qu’un peu de sang a déjà coulé. Les mêmes incidens se sont produits sur plusieurs points du territoire, avec des caractères analogues, et la succession n’en paraît pas encore terminée : Paris même a été légèrement atteint. Naturellement, la Confédération générale du Travail, la fameuse C. G. T., voit dans ces échauffourées une occasion pour elle d’intervenir. Toutes les fois que des manifestations d’anarchie se produisent quelque part, elle sent qu’elle sera là dans son élément, et elle y envoie ses représentai pour augmenter le trouble et le désordre. On pense bien que le citoyen Yvetot, par exemple, n’a pas un moment l’idée de s’enquérir de la cause de la crise et d’exercer un bienveillant et impartial arbitrage entre les petits vendeurs et les ménagères : son rôle est de souffler sur le feu pour le faire flamber davantage et, quand son but est atteint sur un point, il va opérer sur un autre. Une note d’origine officieuse a paru dans les journaux pour signaler nominalement un certain nombre d’agitateurs appartenant à la C. G. T., et coupables de délits caractérisés. C’était fort bien de les dénoncer à l’opinion publique, mais il fallait les dénoncer du même coup aux parquets. On la fait sans doute, ou bien les parquets se sont spontanément saisis de l’affaire, comme c’était leur devoir ; des mandats d’arrêt ont été lancés contre Yvetot et quelques autres. Nous n’étonnerons sans doute pas beaucoup nos lecteurs lorsque nous dirons qu’on n’a plus trouvé ces messieurs au moment de procéder à leur arrestation. Le parquet, lui aussi, s’était mis trop tard en mouvement et les agitateurs de la C. G. T. avaient pris le large en négligeant de donner leur nouvelle adresse. On a arrêté, poursuivi, condamné quelques malheureux qui avaient obéi à leurs suggestions : quant à eux, ils courent encore et, quand on les rattrapera, nous aurons d’autres préoccupations. Cependant, aux dernières nouvelles, nous apprenons que le citoyen Broutchoux a été arrêté à Denain où, dans une réunion publique, il avait insolemment prêché le sabotage en temps de paix et la crosse en l’air en temps de guerre : est-ce un commencement ?

L’exhaussement des prix tient à plusieurs causes dont quelques-unes sont très sérieuses. Il n’est pourtant pas impossible que les vendeurs aient profité de l’occasion plus que de raison et si les ménagères