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Sforza et Giuseppe Gallavresi[1]. Il m’est difficile de le lui reprocher trop sévèrement. Quand on n’a pas eu soi-même le courage, la patience ou le loisir, en ayant eu quelquefois l’intention ou le désir, d’entreprendre et de pousser jusqu’au bout une édition complète et annotée de la Correspondance de Chateaubriand, et d’engloutir dans cet absorbant travail une dizaine d’années de sa vie, on se doit d’être indulgent pour les autres. Imparfaite, assurément, et nécessairement provisoire, l’édition de M. Louis Thomas, à en juger par le premier volume, témoigne d’un labeur très méritoire et, telle qu’elle est, nous rendra les plus grands services ; elle a d’ailleurs ce mérite éminent d’exister, puisque, soixante-quatre ans après la mort de Chateaubriand, elle est la première en date. Il faut souhaiter qu’elle continue à recevoir les encouragemens efficaces des travailleurs, des lettrés, de tous ceux qui possèdent encore des lettres autographes ou des copies de lettres de René[2]Comme le dit très bien M. Louis Thomas, « Chateaubriand appartient au patrimoine de la France : » il est d’un intérêt général que cette première édition de sa Correspondance, — que sans doute on ne refera pas de sitôt, — soit aussi complète que possible.

Le premier volume de cette Correspondance comprend trois cent quarante-quatre lettres, ou fragmens de lettres, — car quand certaines lettres ne lui sont connues que par des catalogues d’autographes, le nouvel éditeur, en attendant mieux, reproduit les indications et citations, presque toujours trop fragmentaires, des catalogues[3], — et il nous conduit jusqu’au

  1. Carteggio di Alessandro Manzoni a cura di Giovanni Sforza e Giuseppe Gallavresi, con 12 ritratti e 2 fac simili, 1803-1821 ; Milan, Ulrico Hoepli, in-16.
  2. Pour prêcher d’exemple, voici une lettre inédite de Chateaubriand à Michelet, dont je dois la communication à feu Gabriel Monod :
    « 29 février 1840.
    « Je n’ai qu’un regret, monsieur, c’est de ne pas vous avoir rencontré chez vous ; je ne mérite point vos éloges, mais j’en suis extrêmement flatté. J’ai commencé votre quatrième volume : malgré ce que je croyais savoir du XVe siècle, j’ai vu que j’avais encore bien des choses à apprendre. Je vais continuer une lecture aussi instructive qu’attachante.
    « Je vous prie, monsieur, de parler de moi à votre fils, et d’agréer, avec l’hommage de mon admiration, l’assurance de ma considération la plus distinguée.
    « CHATEAUBRIAND. »
  3. Quelques lettres ou fragmens de lettres sont mal datés. Par exemple, p. 59 le 20 prairial ne saurait correspondre au 9 janvier 1802. Dans la même lettre, au lieu de : « au mois d’août, » il faut lire, je crois : « au mois d’avril. » — Pourquoi enfin, dans ce volume, n’avoir pas mis de Table des matières ?