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partagée avec son mari. La quotité en était fixée par la coutume ou par les parties. Le douaire légal était quelquefois du tiers, plus souvent de la moitié des biens du mari. Il était constitué quelquefois non seulement au profit de la veuve mais aussi au profit des enfans. Il était vu favorablement par la loi civile et par l’église qui en consacrait la constitution dans la cérémonie nuptiale par les mots traditionnels : « De mes biens je te doue à la coutume du pays. » Le douaire n’était pas le seul gain de survie de la veuve. Le don mutuel en était un aussi et celui-là, comme le mot l’indique, profitait à l’un et à l’autre des conjoints mais l’effet en était bien restreint parce que, ne portant d’ailleurs que sur l’usufruit, il n’était valable qu’à défaut d’enfans. Toutefois les parens pouvaient, en mariant leurs enfans, leur imposer par contrat de mariage l’obligation de laisser jouir le père ou la mère survivante de l’usufruit des meubles et cou quels immeubles du prédécédé. A défaut d’inventaire en règle, la communauté continuait entre la veuve et les enfans mineurs. Cela donnait naissance à l’une de ces sociétés taisibles qui, issues d’origines diverses, prolongeaient l’indivision dans la propriété et dans la famille.

En résumé quelle situation le droit et l’usage coutumiers, tels qu’ils avaient été fixés par les jurisconsultes réformateurs et la jurisprudence du XVIe siècle, faisaient-ils à la femme commune en biens ? Que devenaient, sous l’influence de la puissance maritale, ses intérêts pécuniaires ? On estimera sans doute comme nous qu’elle n’avait pas trop à se plaindre du régime de communauté. Il faut reconnaître que, si ces intérêts y ont été subordonnés à cette puissance, ils y ont été, après ce principe supérieur, le premier souci. On ne pourrait, sans être dupe d’une subtilité juridique, prétendre qu’ils n’étaient que réservés tant que durait la communauté, qu’ils n’étaient défendus que quand elle était dissoute, c’est-à-dire trop tard si le mari l’avait administrée de telle façon qu’elle n’offrait plus qu’un passif. Outre que dans ce cas la veuve pouvait avoir recours contre les propres du défunt, comment oublier, au cours même de la communauté, la nécessité de la participation de la femme commune pour l’aliénation des propres, celle du remploi des conquêts immobiliers, l’hypothèque générale, la séparation de biens ? Ces garanties, dont l’effet était immédiat, montrent assez que, pour la formule de Du Moulin que nous avons reproduite : Uxor non est