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la dot fût inaliénable, son intervention dans l’aliénation faite par le mari rendait cette aliénation valide en ce sens qu’elle ni ; pouvait revendiquer l’immeuble aliéné en nature mais seulement sa valeur, son remploi ou une indemnité. Quant aux libéralités entre époux, le don mutuel lui-même était interdit.

Les régimes légaux pouvaient, dans une certaine mesure, être modifiés par les conventions des parties. Telles de ces modifications devenaient habituelles dans certains pays. Dans le ressort du parlement de Bordeaux, c’est-à-dire dans un pays de (totalité, les conjoints ajoutaient souvent à leur contrat une clause de société d’acquêts. Le droit matrimonial coutumier admettait même des clauses stipulant la séparation de biens, excluant la communauté, mais il ne permettait pas de toucher à certains principes : par exemple, il n’aurait pas laissé porter atteinte par l’introduction de l’inaliénabilité dotale à la conception qu’il se faisait des rapports entre époux ni, d’une façon quelconque, à l’autorité maritale.

Nous avons représenté la femme dotale comme jouissant de plus de capacité que la femme commune. Comment concilier cette façon de voir avec la situation dépendante qu’elle partageait avec son mari dans la maison de ses beaux-parens ? Pour réduire cette contradiction apparente à sa juste valeur, il faut observer d’abord que l’épouse dotale ne devenait pas toujours la commensale de sa nouvelle famille et ensuite qu’alors même qu’elle entrait sous le toit de celle-ci, il pouvait intervenir entre les ascendans et le nouveau ménage des conventions de nature à sauvegarder les intérêts de celui-ci. Quelquefois c’était chez les parens de la femme que les nouveaux mariés venaient vivre. En 1624, dans le Berry, un valet de ferme, François Tixier, au lendemain de son mariage avec Jeanne Collin, s’engageait à habiter avec son beau-père et à rester six ans à son service pour pouvoir gagner son affiliation à la communauté qui n’avait pas à attendre de lui d’autre profit que son travail. Il payait à son beau-père, le jour de la bénédiction nuptiale, 30 livres. Il gagnera en moyenne 25 livres par an, 150 livres pendant les six années et sera habillé et chaussé. À ces conditions il obtenait de son beau-père Et. Collin son affiliation immédiate et sa désignation comme héritier au même rang qu’un des enfans.

En terminant cet examen succinct de nos régimes matrimoniaux, où nous nous sommes surtout proposé de discerner la