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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 10.djvu/424

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dans la situation subalterne du complice par rapport au mari. Elle entraînait la mort pour les deux coupables. Cette sévérité s’explique beaucoup moins par l’indignité du complice, par la violation de la hiérarchie sociale que par l’abus de confiance qui augmentait la culpabilité et qui devait être d’autant plus sévèrement frappé qu’un contact intime donnait plus de facilité pour le commettre.

Aux sanctions pénales s’ajoutaient naturellement pour la femme adultère, dans l’ordre civil, la perte de ses droits matrimoniaux, de l’usufruit de ses deniers dotaux et même de ses paraphernaux.

A part la rigueur déployée contre ce qu’on pourrait appeler l’adultère domestique, on constate donc dans la répression un adoucissement, et cet adoucissement correspond naturellement à plus d’indulgence dans l’opinion. La multiplicité des adultères, la facilité des démariages avaient blasé l’indignation à l’égard de la violation de la fidélité conjugale et amenaient à y voir moins une atteinte à l’institution constitutive de la famille qu’une infortune particulière. Sans parler des maris complaisans, de ceux qui ne se reconnaissaient pas le droit d’être sévères, il y en avait beaucoup qui ne se servaient qu’à moitié des armes que la loi mettait dans leurs mains, abrégeant la réclusion, laissant écouler la prescription de cinq ans qui éteignait l’action privée. En voici un, Philippe Claus, qui avoue que pour tenir son ménage et l’assister dans sa vieillesse, il ne peut se passer de sa compagne qui a témoigné d’ailleurs un grand repentir et lui a fait souvent demander pardon. Il sollicite en conséquence pour elle des lettres patentes qui lui remettent le bannissement auquel elle a été condamnée et qui lui permettent de revenir près de lui.

La situation que la loi et les mœurs faisaient aux enfans naturels va nous aider encore à nous représenter comment on appréciait l’excellence morale et sociale du mariage, l’importance de ses devoirs. Les enfans naturels, même s’ils étaient adultérins et incestueux, avaient droit à des alimens. Ni les uns ni les autres de ces derniers ne pouvaient rigoureusement, sauf le compte à tenir des circonstances, prétendre à autre chose, mais ils pouvaient, à titre alimentaire, recevoir des libéralités particulières. Le père naturel s’acquittait de sa dette envers ses enfans illégitimes en leur faisant apprendre un