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sait d’autant plus facile que des avantages de tarifs, inscrits dans les lois de douane, semblaient un stimulant suffisant. Les longues campagnes des baleiniers passaient, d’autre part, pour une des meilleures écoles où se pussent aguerrir des marins, et c’était un motif très suffisant pour les encourager. Ici, toutefois, impossible de se contenter de combinaisons financières ou de primes. Il fallait que baleiniers ou cachalotiers trouvassent, le cas échéant, l’aide et la protection qui leur seraient nécessaires ; il fallait aussi que leurs équipages ne perdissent pas à la longue toute discipline au point, par exemple, de se livrer, lors des relâches, à des violences regrettables. Pour exercer une surveillance comme pour accorder la protection, point d’autre moyen que de faire effectuer des croisières dans les régions de pêche. C’est dans ce dessein qu’à la fin de 1836 le futur amiral Dupetit-Thouars était nommé au commandement de la Vénus et chargé d’une mission de surveillance, d’enquête et d’exploration dans les archipels du Pacifique. En ce qui concerne enfin les missionnaires, le gouvernement de Louis-Philippe appréciait leurs efforts et, comme jadis le gouvernement de Charles X, les tenait pour capables de contre-balancer l’influence britannique ; mais son affectation d’indépendance religieuse le condamnait en même temps à quelque réserve. De là des contradictions, au moins apparentes, et ce qui put sembler parfois un certain manque de franchise. A ma connaissance, nulle pièce ostensible n’affirme, durant les dix premières années du règne, l’intention de se servir des missionnaires, ni le désir de les protéger. De même, si un vicaire apostolique écrit au ministre de la Marine, celui-ci ne répond pas : il fait cependant répondre par un directeur, en même temps qu’il tient grand compte des renseignemens envoyés. Il parle aussi quelquefois des missionnaires dans des instructions « très secrètes » qu’il remet à des commandans de navires. En outre, — et cela seul serait déjà caractéristique, — ce sont très fréquemment des bâtimens de l’État qui amènent les missionnaires dans les lieux d’évangélisation et qui les visitent ensuite systématiquement. Enfin, quand les missions sont en butte aux vexations des indigènes, le premier commandant de croiseur informé intervient pour exiger réparation et garanties : c’est ainsi, notamment, que des traités pour la protection du culte catholique furent conclus en 1837 et 1839 avec les souverains des iles Sandwich et de Tahiti.