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Mais, je ne sais pourquoi j’assiste en étranger
A l’ample éclosion de tant d’ivresse vierge,
Ni pourquoi mon vieux cœur comme autrefois n’héberge
La divine douceur de croire et de songer.

Peut-être quelque chose en ce cœur que j’ignore
S’est-il fatalement brisé jusqu’au trépas ;
Ce quelque chose, hélas ! qui ne refleurit pas,
Et qui fit cependant ma chanson plus sonore.



DIEU


Une grande douceur tombe du soir d’été.
Il semble qu’absorbant toute l’extase en elle,
Cette heure doive enfin demeurer éternelle,
Et que le temps se soit pour jamais arrêté.

Or, moi-même si près du ciel que l’humble argile
Dont fut formé mon corps n’enferme plus l’esprit,
Je m’élance vers l’idéal qui me sourit.
Explorant l’horizon serein d’un vol agile.

Et je sens qu’au delà de ce que nous voyons,
Plus loin encor que les plus lointaines étoiles,
Irradie un foyer caché par tant de voiles
Qu’à peine l’homme en soupçonne-t-il les rayons !



OCTOBRE


Automne aux pas feutrés, automne, te voici
Dans la plainte des bois, dans leur rouille naissante ;
Mais ta venue est tendre assez pour que je sente
Ma souffrance embaumée en mon cœur adouci.

La noble gravité dont tu marques les choses
Gagne de proche en proche et sans hâte s’étend
De la mélancolie intime de l’étang
Au jardin merveilleux que tu métamorphoses.