Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 12.djvu/945

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’Heinsius, l’une des figures les plus nettes de ce groupe de transition qui illustra la fin du XVIIIe siècle.

Etrange et triste destinée de ses plus illustres modèles ! Madame Adélaïde et Madame Victoire finissent leur vie en exil. Au début de la tourmente révolutionnaire, Joséphine Comtesse de Provence et Marie-Thérèse Comtesse d’Artois devaient trouver asile à la Cour de Turin auprès de leur père Victor-Amédée III. Quant à l’effet produit par les Princes français à la Cour de Sardaigne, on a pu le voir par le Diario, ce curieux Journal, commencé en 1785 par Charles-Félix, Duc de Genevois, dont de piquans extraits ont été donnés ici même par M. le vicomte de Reiset. Le même auteur publie aujourd’hui sur Joséphine de Savoie Comtesse de Provence[1]un ouvrage presque tout entier fait d’après des documens inédits et rares, tirés de précieuses archives jusqu’ici jalousement fermées, qui lui ont permis de reconstituer l’existence de la malheureuse princesse. De magnifiques portraits en phototypie et en héliogravure, recueillis à Versailles, au Carmel de Saint-Denis, dans les collections particulières, dont beaucoup inconnus ou inédits, ornent cette belle étude historique.

On ne lira pas avec moins d’intérêt les péripéties qui caractérisent l’existence de Madame Royale[2]fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette et plus tard Duchesse d’Angoulême, depuis le jour où elle fut enfermée au Temple jusqu’à son mariage. Elle est écrite par l’auteur de l’Histoire de l’Emigration, M. Ernest Daudet, d’après les papiers de M. de La Fare, les archives de Louis XVIII et les lettres de Madame Royale, mises à sa disposition par M. le duc de Blacas, elle est ornée de portraits et estampes du temps.

Parmi les œuvres qui vivent d’une vie supérieure et que l’âge n’atteint point, dont la gloire survit à toutes les révolutions, celles de Dante et de Shakspeare, parce qu’elles ont pris possession de l’âme humaine, domineront du fond du passé les époques postérieures.


Onorate l’altissimo poeta,
L’ombra sua torna, ch’ era dipartita.

(Honneur au très grand poète ! Son ombre nous revient, qui s’en était allée.)


Le salut donné par les quatre grandes Ombres d’Homère et d’Horace, d’Ovide et de Lucain, à Virgile, à sa descente avec Dante aux Enfers, c’est à l’auteur de la Divine Comédie que l’adressent ses admirateurs en lui retournant ses propres vers du Ive chant. La gloire

  1. Émile-Paul.
  2. Hachette.