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commission, bien achalandées, appartiennent à des compatriotes, elles ne parviennent pas toujours, malgré des demandes détaillées en France, à se pourvoir d’articles français, qu’achèterait volontiers leur clientèle. Dans la campagne, quelques vignobles sont propriétés françaises ; beaucoup de viticulteurs chiliens engagent des Français, Bourguignons et Girondins, pour la direction de leurs vendanges et de leurs chais. En ces divers ordres d’activité, nos concitoyens arrivent presque tous à une aisance au moins moyenne ; acharnés au travail pendant les années de conquête, ils s’accordent ensuite des voyages en France, mais sans abandonner leur résidence au Chili. Les Basques se distinguent par leur soin de se faire toujours relever par des jeunes qu’ils forment eux-mêmes, avant de leur transmettre leurs affaires ; de là, entre notre pays basque et le Chili, la continuité de relations toujours entretenues : le 18 septembre dernier, quatre-vingts « Américains » des Basses-Pyrénées se réunissaient en un banquet, à Cambo, pour célébrer la fête nationale du Chili.

Bien que le gouvernement français se soit peu inquiété de développer là-bas notre influence, des concitoyens, venus spontanément ou mandés par des amis, s’élèvent à des situations éminentes parmi les intellectuels et dans les professions libérales. Les Chiliens apprécient en connaisseurs l’art de nos architectes, qui savent construire avec les matériaux du pays, donnent de la grâce à la brique, lorsque la pierre manque, et courbent harmonieusement la raideur des poutres de fer. Le Palais des Beaux-Arts de Santiago est une œuvre française ; une des premières imprimeries et lithographies d’art de la capitale est dirigée par un compatriote : les Chiliens estiment qu’il n’est pas indifférent de composer avec goût des vignettes réclames et des en-têtes de papier commercial. Des ingénieurs français sont employés par les chemins de fer de l’Etat, d’autres ont proposé au gouvernement d’électrifier une section du longitudinal, prouvant encore sur ce terrain la particulière faculté d’adaptation de la science française. Un ancien polytechnicien organise le service d’observation des tremblemens de terre ; son modeste laboratoire est creusé à la base du Cerro de Santa Lucia, au-dessous d’une plate-forme où chaque jour le coup d’un canon Krupp éclate, pour annoncer midi. L’alcantarillado, ou travail d’assainissement de Santiago par un réseau d’égouts, difficile