jours d’octobre, une crise nouvelle se déclarait, compliquée de « fièvre miliaire, » et le bruit courait aussitôt que sa vie était en danger. « M. de Clugny est toujours très mal, écrivait Mme du Deffand[1] ; on n’en désespère pas absolument, mais chacun lui nomme un successeur. » Une visite que Maurepas crut devoir faire au contrôle général, pour y chercher les pièces nécessaires aux affaires courantes, acheva de fixer l’opinion : il était venu, disait-on, « apporter au malade les derniers sacre-mens. » Clugny lui-même était sans illusion. A son ami de Vaines, qui, pour le rassurer, lui citait l’axiome populaire : « Un contrôleur général ne meurt jamais en place[2], » il répondait froidement : « Eh bien ! je ferai mentir le proverbe. » Un changement de médecin et de nouveaux remèdes procurèrent un mieux passager ; mais bientôt la poitrine se prit et, le 18 octobre, il rendit le dernier soupir, au milieu des « cinq femmes » qui entouraient son lit et qui « remplirent de leurs clameurs » l’hôtel du contrôle général : c’étaient, dit un récit du temps[3], « Mme de Clugny, son épouse, Mme de Clugny, sa belle-sœur, Mme Tillorier, sa maîtresse favorite, cl les deux sœurs de cette dernière, qui la suppléaient tour à tour. »
La nouvelle de cette mort fut accueillie dans le public par un soupir de soulagement. « Vous jugez, s’écrie un gazetier[4], de la joie qu’on a reçue d’être délivrés de ce fléau, de ce monstre ministériel, très propre à ramener les calamités encore récentes de l’abbé Terray ! » On composa cette cruelle épitaphe :
Ci-gît Clugny, de qui la fin
De sa vie est digne, sans doute.
Il aimait tant les pots de vin,
Qu’il devait mourir de la goutte.
Le passage de Clugny au contrôle général peut être regardé comme un court accès de folie entre deux périodes de sagesse. Pendant ces quelques mois s’étaient amassées bien des ruines :