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jusque dans cette déposition d’un instituteur, témoin à décharge d’un de ses anciens élèves, qui était entré dans une bande d’apaches : « Il possédait un peu de toutes les questions du programme ! »


S’il y a en ce moment un malaise reconnu de tant de côtés différens, il est difficile de ne pas se poser cette question : a-t-on bien assuré aux travailleurs de la main et à ceux de l’esprit la formation qu’ils réclamaient ?

Il importe de le rappeler, les plaintes étaient nombreuses avant la réforme si discutée de 1902 ; mais, pour défendre le présent, a-t-on le droit de se retrancher derrière l’existence d’un mal qu’on avait offert de guérir et qu’on a peut-être aggravé ?

En toute hypothèse, notre devoir est ici de retrouver l’enchaînement des symptômes qui peuvent aidera mieux remonter à la cause profonde.

Sans entrer dans le détail de tous les procédés universitaires d’il y a un quart de siècle, questionnons les hommes qui, dans les concours d’agrégation, jugeaient les licenciés de la veille, les bacheliers de l’avant-veille, les maîtres du lendemain. Le principal rapport officiel de 1893 était sévère. Il montrait la connaissance du latin tombée fort au-dessous de celle que possédait un bon bachelier d’avant 1870. — Peut-être les candidats avaient-ils secoué le joug de vieilles superstitions classiques ? Ils dédaignaient les périodes cicéroniennes, mais pour s’intéresser ardemment à des littératures dont ils pouvaient partager les émotions ? Alors ils avaient dû charmer leurs juges par leurs fantaisies et par leurs hardiesses heureuses ? — Eh bien ! non, tel n’est pas l’avis du président. Il avoue que quelques rares candidats savent seuls expliquer leurs idées et visent (il ne dit pas parviennent) à la netteté et à l’élégance, mais que les diversités tendent à se fondre dans une médiocrité générale. Bien peu après (1898), le même président rend hommage au travail dépensé dans la préparation technique… de toutes les parties du programme. Mais cet effort a été si lourd qu’il n’a laissé aucun temps pour la composition. Aussi lisons-nous : « Ce qui manque, c’est l’habitude de raisonner et d’aller au fond des choses, c’est la faculté de s’approprier les idées par la netteté de l’expression ; les analyses sont insuffisantes, les