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III

Le 12 avril, la discussion vint devant les Seigneurs. L’heure était grave : Mgr Kopp demanda la parole. « C’est un prêtre habile, disait Bennigsen, mais, autant que cela est possible à un prince de l’Église, il a vraiment les sentimens d’un bon Allemand. » Avec une nuance de méfiance persistante, Bennigsen définissait ainsi, d’une façon très exacte, l’impression que produisirent les interventions oratoires de Mgr Kopp : le prêtre, en lui, ne se cachait pas ; mais dans la personne de ce prêtre, c’était toujours un citoyen de l’Empire, un législateur du royaume, un Allemand, un Prussien chargé d’un mandat civique, qui réclamait son droit à être entendu, écouté, suivi.

Il constatait le malaise, la défiance réciproque qui séparait les membres de la patrie. Il remontait jusqu’à la cause : c’était l’effort qu’on avait tenté de légiférer sur l’Eglise sans accord préalable avec l’Eglise. D’où venait la faute ? où trouver la responsabilité ? Il jugeait une telle question superflue ; mieux valait chercher pacifiquement, dans un esprit de conciliation, les routes qui sortiraient de ce labyrinthe. « Le gouvernement, avouait-il, a de la bonne volonté ; et cependant, on est encore loin de l’issue, d’abord parce que le gouvernement, ralenti par une sorte de crainte injustifiée, a peur d’arriver trop vite au but, et puis parce que longtemps on persista dans cette idée fausse, de se passer de l’Eglise pour régler sa destinée. C’est une idée sur laquelle le gouvernement est revenu ; et voilà un progrès. » Mais le prélat expliquait que le projet tel quel ne suffisait pas : il relisait ses amendemens, il en développait la portée. Les adopter, ce ne serait pas encore faire une révision complète des lois, mais du moins pourrait-on, ainsi, arriver effectivement à la paix. Il ne faut pas considérer, déclarait-il en terminant, que l’Etat fait des concessions ; « ce sont des restitutions qu’il fait, car l’Église estime que les lois à modifier l’ont privée de droits imprescriptibles, et l’Église, reconnaissante pour ces restitutions, cède sur d’autres points à l’État. » Mgr Kopp, dès ce premier discours, se distinguait par cette façon, très adroite et très véridique, — adroite, parce que véridique, — de prendre pour point de départ les besoins de l’État, notoires pour tout pair de Prusse, pour tout citoyen de Prusse, et d’acheminer les