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s’affaiblissait de jour en jour : le futur cardinal Galimberti, devenu en juillet 1886 secrétaire des affaires ecclésiastiques extraordinaires, accueillait volontiers les visites de Schloezer, et commençait à faire pencher Léon XIII vers de graves décisions.

Le 5 décembre, Di Pietro, en remerciant Windthorst pour ses renseignemens, lui fit savoir confidentiellement (in allem Geheimniss) que le Saint-Siège désirait que le Centre se montrât bienveillant (wohlwollend) à l’endroit du projet bismarckien. Windthorst alors travailla pour que ses collègues consentissent aux augmentations d’effectif et de crédits militaires réclamées par Bismarck, mais seulement pour une période de trois années : il parvint à les y décider, et le 23 décembre, il faisait part à Di Pietro de cette détermination conciliante, en ajoutant qu’à son vif regret Bismarck n’était pas encore content.

Cette demi-mesure, en effet, paraissait insuffisante à Bismarck, et sans doute le fit-il savoir au Saint-Siège ; car le 2 janvier, Di Pietro transmettait à Franckenstein une communication de Rome, invitant Franckenstein et Windthorst, pour de « graves motifs, » à faire voter la loi de septennat[1]. Le lendemain matin, des instructions plus détaillées, signées du cardinal Jacobini, mais préparées par l’adroite plume de Galimberti, parvenaient à Di Pietro. Elles portaient qu’en favorisant « de toutes les façons possibles » le vote du septennat, les membres du Centre feraient un grand plaisir à Rome ; qu’ils serviraient la cause des catholiques, en induisant ainsi le gouvernement de l’Empire à des dispositions de plus en plus propices ; qu’ils accéléreraient l’avènement d’une paix religieuse complète ; qu’ils écarteraient enfin le péril d’une guerre, et qu’ils mériteraient immensément, et de la patrie, et de l’humanité, et de toute l’Europe. Di Pietro n’avait pas mission de transmettre au parti du Centre le document pontifical : le secrétaire d’Etat « confiait ces considérations au tact et à la perspicacité » du nonce, et le chargeait d’en user « vis-à-vis des personnes qui pouvaient entrer en ligne de compte. »

  1. Le P. Fah, qui profita, pour son étude sur Franckenstein, des archives du château d’Ullstadt, laisse comprendre par la trame même de son récit (Slimmen aus Maria Laach, XL, p. 148) que ce fut quelques semaines avant Noël 1886 que parvinrent à Franckenstein les premières indications du nonce ; et la date du 5 décembre est donnée par le P. Pfülf, Aus Windthorsts Korrespondenz, p. 72. Nous sommes fondés à croire que cette date n’a rien d’arbitraire : des documens qui relèvent au-dessus de toute contestation paraîtront peut-être un jour.