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Ce dernier, parfaitement certain que son adversaire immédiat chercherait à se procurer des renforts, prit alors, en parfait accord avec le gouvernement et l’amirauté anglaise, les judicieuses mesures que voici :

La force navale de la Méditerranée fut chargée de se montrer activement sur le littoral espagnol, de Tarragone à Alicante, et d’affecter d’y chercher un point de débarquement favorable à l’armée anglo-sicilienne qu’organisait à Palerme sir William Bentinck, vrai souverain de la Sicile à cette époque, pour le compte de l’Angleterre. Disons tout de suite que, de ce côté, la feinte n’était pas complète. Les Anglais avaient bien l’intention d’exécuter cette descente, mais, en fait, l’opération n’eut lieu qu’après les événemens qui nous occupent. Toujours est-il que le maréchal Suchet, quoique parfaitement intentionné pour le bien commun, dut refuser de concourir à la défense delà Vieille-Castille et se borner à faire avancer une de ses divisions vers le centre de l’Espagne, pour permettre au roi Joseph d’en détacher une de Madrid vers Salamanque.

Du côté de l’Andalousie où commandait, où régnait, peut-on dire, le maréchal Soult, homme de guerre de premier ordre, mais médiocre camarade, la division navale anglaise du détroit eut la mission de multiplier les opérations d’embarquemens, de coups de main, de réembarquemens rapides qu’elle exécutait avec les contingens espagnols, renforcés de quelques Anglais, commandés par Ballesteros. Il n’en fallait pas plus — avec certaines démonstrations du général Hill qui commandait à Badajoz — pour faire pousser les hauts cris au duc de Dalmatie, quand l’état-major du roi Joseph lui demanda d’acheminer 10 ou 12 000 hommes vers Salamanque. Donc, de ce côté-là encore, le maréchal Marmont ne devait rien obtenir.

Du moins comptait-il sur le secours de l’armée la plus rapprochée de la sienne, l’armée du Nord, sous Dorsenne, d’abord, sous Caffarelli ensuite. Ce dernier avait même promis une dizaine de mille hommes, sur les 45 000 dont il disposait, et c’était beaucoup. C’eût été assez, en tout cas, pour tenir tête à l’armée de Wellington et pour conjurer la funeste échauffourée des Arapiles.

Malheureusement, dès le début de juillet, le bruit se répandit, sur la côte du Nord de l’Espagne, de la prochaine arrivée d’une flotte anglaise portant un corps de débarquement.