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mon fils vient de vous confirmer, que cette séparation violente, avec toutes les circonstances qui l’ont précédée, mettra votre fille au désespoir, et peut avoir les suites les plus funestes pour elle, apparemment que vous avés bien pensé à ce que vous lui dirés quand elle vous en demandera les raisons. Il est nécessaire que je sois prévenu d’avance de ce que vous comptés lui dire, ainsi vous prie de me l’écrire clairement et positivement, je vous donne vingt-quatre heures pour faire cette réponse et je vous préviens que je garde copie de cette lettre qui contient tous mes arrangemens pour l’éducation de ma fille et qu’il n’y a rien dans l’univers qui puisse m’y faire changer la moindre des choses jusqu’à ce que son éducation soit finie.

« Comme le départ de Mme de Sillery change tous mes plans pour mes enfans, je vous préviens que j’envoie le second dans quelques semaines voyager en France sur les côtes jusqu’à ce que je l’emmène avec moi, je lui donne pour le suivre M. Myris. Pour le dernier, je le retire aussi du Palais-Royal et je l’envoie à un port de mer finir son éducation, parce que je le destine à la Marine. Je lui donne pour instituteurs MM. Lebrun, Lecouppey et Alyon, un valet de chambre et deux valets de pied. Voilà tous mes arrangemens et soyés bien sûre qu’ils sont irrévocables. Pendant quinze ans je n’ai rien fait pour mes enfans sans vous consulter et sans agir de concert avec vous, mais vous leur montrés que vous n’avés aucun égard pour mon repos et à ma volonté sur eux, et par là c’est vous seule qui me forcés à vous ôter sans retour toute espèce d’influence sur leur éducation. »

La Duchesse, atterrée de la brutalité de cette signification, contient sa douleur et ne proteste que pour rétablir la réalité des faits :

... » Vous me mandés que vous m’avés toujours consultée pour ce qui regarde mes enfans, tandis que vous scavés fort bien que je n’ai jamais été consultée pour rien et que toutes les autres fois que vous m’avés annoncé quelque chose qui avoit rapport à eux, c’étoit toujours une chose décidée à laquelle il falloit me soumettre. Vous scavés tout aussi bien que toutes les personnes qui les entourent ont été choisies par Mme de Sillery, que j’apprenois tout quand la chose étoit faite, comme cela est encore arrivé dernièrement pour cette Eveline qui est une fille publique... Vous scavés au contraire que je ne me suis pas permis