Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/484

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un parlement étranger, d’une institution militaire française ? Le gouvernement impérial s’y prêtera-t-il ? Nous espérons bien, en tout cas, que le nôtre n’accepterait jamais une conversation sur un pareil thème. On ne pourrait nous y inviter que si on nous cherchait une querelle et, si on nous cherchait une querelle, à défaut de ce sujet, on en trouverait un autre. En tout cas, nous garderions notre honneur sauf.

Mais nous sommes loin de croire à de pareilles intentions de la part du gouvernement impérial. Il a su plus d’une fois, comme nous l’avons su nous-mêmes, résister à l’opinion dans ses emportemens, ménager la dignité d’autrui et conserver son sang-froid. Malgré tout, ce grondement continuel venu de l’autre côté de la frontière crée un énervement qui n’est pas sans danger, et le fait que les susceptibilités et les animosités sont aujourd’hui à peu près générales n’est pas fait pour en diminuer le sentiment. Tantôt c’est l’opinion italienne qui nous prend à partie parce que M. Barthou lui a adressé de bonnes paroles ; tantôt c’est la même opinion italienne qui se tourne contre l’Autriche pour une imprudence commise à Trieste ; tantôt c’est l’Allemagne qui découvre notre Légion étrangère après trois quarts de siècle d’existence et qui la dénonce à la vindicte du genre humain outragé. Il semble que la mauvaise humeur soit le sentiment qui domine en Europe. Les prétextes qui lui donnent naissance ont une si faible consistance que nous n’y prendrions pas garde, si l’état du monde était normal. Mais il a suffi de jeter un coup d’œil sur l’Orient pour constater combien nous étions encore loin du moment où, après une perturbation profonde, les États balkaniques auront enfin retrouvé l’équilibre stable qui nous donnera à nous-mêmes un peu de repos.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.