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Un grand souffle passa sur le mont solitaire,
Un souffle qui semblait le parfum de la terre,
Et troubla de tout son mystère
Le silence du soir et la paix de nos cœurs !

Vous écoutiez chanter cette brise embaumée.
Immobile, sans voix et la lèvre pâmée ;
Puis sur mon épaule en tremblant,
Vous avez incliné votre tête pâlie.
Et dans vos yeux j’ai vu tant de mélancolie.
Que j’ai compris quelle folie
Nous poursuivait toujours de son regret troublant…

Mais nos lèvres pourtant n’ont point mêlé leurs flammes ;
Car, pour combler le rêve infini de nos âmes,
Que pouvait un baiser encor ?
Et cet appel d’amour qu’il nous semblait entendre,
Parmi la paix du soir qui sur nous vint s’étendre.
Qu’était-il ? Une voix plus tendre,
Mais une simple voix dans un sublime accord !

Car il flottait épars dans tout ce qui nous grise,
Dans le silence, et la solitude, et la brise,
Dans le soir calme et solennel.
Cet amour, qui pour ne pas être qu’éphémère
De l’aurore trop belle à la nuit trop amère,
Ne fut pour nous qu’une chimère.
Qu’un rêve... mais un rêve idéal, éternel !


UN SOUVENIR...


Puisque l’heure s’enfuit dès qu’elle nous effleure,
Maintenant pour toujours, hélas ! elle a passé.
L’heure qui vint un jour unir nos routes, l’heure
Où nous vîmes enfin notre rêve exaucé !

Il nous semblait, grisés de vertige et d’espace,
Que nous irions sans cesse en un soir éternel,
Et nous ne pensions plus que chaque instant qui passe
Fait la route moins longue et plus sombre le ciel !