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Et quand tu paraîtras, l’inutile reproche
Ne fera point trembler la douceur de ma voix ;
Calme, j’écouterai ton pas toujours plus proche.
Sans même regarder de loin si tu me vois.

Je le sais si certain l’instant de ta venue,
Que je l’entends déjà, ton pas fatal et lent ;
Tu viendras, il le faut. Peut-être ta main nue
Dans l’ombre effleurera bientôt mon front brûlant.

Car, je te reverrai, toi qui t’en es allée.
Pour fuir, à tout jamais, ton rêve enseveli,
Lorsque tu passeras au détour de l’allée
Qui mène au souvenir ceux qui cherchent l’oubli !


AU CRÉPUSCULE


Puisque ce soir encor le Destin nous rassemble
Une dernière fois, allons tous deux ensemble
Suivre le cher et vieux chemin
Que nous suivions jadis, à cette heure lointaine
Où je n’avais encor, comme preuve incertaine
De votre tendresse soudaine.
Que votre main parfois qui tremblait dans ma main !

Voyez, rien n’a changé du sentier solitaire ;
La même haie en fleur l’entoure de mystère
Et d’une ombre douce aux aveux ;
Le même rossignol chante sur une branche
Et, s’effeuillant sur vous au souffle qui la penche,
Une même aubépine blanche
Vient encore étoiler la nuit de vos cheveux !

Et c’est le même soir qui meurt, les mêmes teintes
Qu’admirent tour à tour brillantes, puis éteintes.
Vos yeux rêveurs, vos yeux si doux.
Le crépuscule a-t-il moins de mélancolie
Ce soir ? N’êtes-vous pas toujours aussi jolie ?
Et les vœux de notre folie
D’avoir été comblés en seraient-ils moins fous ?