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citoyen éligible ; et vous ne balancerés pas à prononcer la nullité de sa nomination. Dans cette position vraiment fâcheuse, nous avons recours à votre justice, affin qu’il vous plaise statuer sur la légalité ou illégalité de la nomination du prétendu Joubert[1]... »

Avant d’aller au Département, l’affaire fut soumise au directoire du district. Conseillée évidemment par Jean Boyer, Mme Joubert composa un mémoire, qu’elle envoya au district, lequel le devait transmettre au Département.

Voici ce mémoire. « Messieurs, Joseph Joubert, mon fils aîné, homme de loix... » A vrai dire, on ne voit pas du tout comment Joubert mérite cette qualité d’homme de lois. A-t-il, sans qu’on en possède aucun témoignage, étudié la jurisprudence à Toulouse, quand il était aux Doctrinaires ? Je ne le crois pas. Et Arnaud Joubert, dans la Notice historique qu’il a fait imprimer pour quelques amis à la mort de son frère, dit que ce frère était « tout à fait étranger aux lois. » Il y avait dans la famille un homme de lois, — un petit homme de lois : — c’était précisément ce jeune Arnaud Joubert que sa mère amenait à Paris en 1786 et plaçait chez un procureur au Châtelet. Mais Joseph Joubert n’est pas homme de lois : homme de lettres, seulement. D’ailleurs, nous l’avons vu, la qualité d’homme de lois n’était pas exigée du candidat aux justices de paix. Mme Joubert, à tout hasard, décernait à son fils ce titre qui, du moins, ne pouvait pas nuire ; et c’est Jean Boyer certainement qui dictait. Reprenons la lecture du mémoire : « homme de loix, âgé de trente-sept ans ou environ, habitant la ville de Paris depuis seize ans, a été élu juge de paix de la ville de Montignac. Cette-nomination à peine faite, le sieur Labrousse plus jeune, surnommé Borredon, a élevé des griefs contre son élection et n’a pu fonder sans doute ses moyens que parce qu’on veut douter que les voix ayent porté ou sur mon fils aîné ou quelqu’un de ses frères... » Et nous nous demanderons si peut-être les meneurs de la campagne électorale n’ont pas utilisé le moins du monde la confusion qui pouvait être faite entre Joseph Joubert homme de lettres et Arnaud Joubert homme de lois… Mme Joubert continue d’énumérer les moyens que mettent en avant les adversaires de son fils : « 2° sur le défaut du serment

  1. Archives de la Dordogne, L. 516.