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d’un maniaque imbécile. M. Roche, qui n’a point pallié ses erreurs, nous a très finement indiqué ce qui se cachait encore de délicatesse dans les déviations de son sens moral.

Tout au plus, pourrait-on aller chercher dans ses dernières années, qui ne furent point le soir d’un beau jour, un nouvel exemple de la triste vanité que recouvre la sagesse épicurienne.


Je voudrais qu’à cet âge
On sortit de la vie ainsi que d’un banquet,
Remerciant son hôte et qu’on fit son paquet...


On dit ces choses-là tant que les lumières du banquet ne commencent pas à s’éteindre et tant que Clymène ou Jeanneton vous sourient entre leurs verres. Mais l’inquiétude entre avec les premières ombres et l’épouvante avec la nuit. Le paquet est lourd, et pourtant qu’y a-t-on mis ? Des riens.


Allons, vieillard, et sans réplique !
Il n’importe à la république
Que tu fasses ton testament.


La mort le brusqua moins. A défaut de testament, elle lui laissa le temps de faire son examen de conscience. Le vieux poète malade, assis dans son lit et son bonnet à la main, demanda pardon à Dieu, aux hommes et à Messieurs de l’Académie d’avoir écrit ses joyeux Contes. Cela fait, l’espoir lui revint au cœur. Il crut qu’il attraperait quatre-vingts ans ; et il conçut « de grands desseins. »


Souffrez qu’à mon logis j’ajoute encore une aile !


Mais tout ce qui lui restait de vie, c’est-à-dire de poésie, il le consacrait à Celui dont la miséricorde avait été touchée par la prière du larron et par l’amour de « l’illustre pécheresse. »


La prière et l’amour ont un charme suprême.


On ne lit pas sans émotion, dans son Dies Iræ, ce beau vers où le dernier écho de sa poésie voluptueuse expire sur ses lèvres purifiées. Et ceux qui terminent la pièce ne sont point sans grandeur :


Je te laisse le soin de mon heure dernière.
Ne m’abandonne pas quand j’irai chez los morts.


Son génie ne le quitta pas tant qu’il fut des vivans. « Je mourrais