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présidait. Il a fait une belle leçon sur les églises du Calvados. Engerand, avec beaucoup d’esprit, a tracé un portrait en pied de M. Homais (qui n’était certainement pas dans la salle, car tout le monde riait de bon cœur et applaudissait). J’ai pris la parole. J’ai insisté sur ce fait qu’en venant dans cette ville célèbre par ses richesses architecturales, au milieu de la Société française d’Archéologie fondée par l’illustre Caumont sur l’appel de Montalembert et de Victor Hugo, je voulais marquer, d’une manière très nette, le caractère de ma campagne et préciser le terrain sur lequel peuvent se rejoindre, sans se donner de démenti, tous les défenseurs de notre trésor artistique, tous les hommes respectueux de la vie de l’esprit. « Empêchons les églises de s’écrouler, ai-je dit ; plus tard, nous nous occuperons du règlement général des difficultés créées par la loi de Séparation. Une solution générale et définitive, tout le monde le sait bien, ne s’obtiendra que le jour où l’on voudra s’entendre avec Rome. Mais aujourd’hui, le problème urgent, pour lequel il faut une solution, fût-elle provisoire, c’est que les églises soient entretenues, sauvegardées, même si les Conseils municipaux s’y opposent. »

Ce sont là les idées que je compte exposer dans mon prochain discours à la Chambre. Elles furent accueillies aussi bien que possible. Sur l’estrade avaient pris place, autour de Lefèvre-Pontalis et d’Engerand, M. Perrotte, maire de Caen, qui est un des chefs du parti radical dans le Calvados, Monseigneur de Bayeux, MM. Flandin, député de Pont-l’Évêque, Souriau, professeur à la Faculté des Lettres et président de l’Académie de Caen ; de Longuemare, président de l’Association normande ; Le Vard, président de la Société des Beaux-Arts, etc. La présence de l’évêque, du maire radical, des députés progressistes, des universitaires, des présidens de sociétés savantes, réunis en dehors de toute division politique pour affirmer qu’il faut sauver les églises, était à elle seule un programme d’action et un résultat.

Je suis très heureux de cette journée. En soi, c’est déjà quelque chose de beau et d’émouvant qu’une affirmation en commun, fût-elle sans effet immédiat ; mais celle-ci me semble prophétiser le salut des églises. D’où pourrait venir un empêchement ? A la Chambre, M. Chéron vient de me dire que, s’il avait été libre, il aurait aimé assister à la réunion, et qu’il était