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nous, sous le régime du Concordat, chacun se le rappelle, c’était la fabrique, autrement dit la communauté religieuse, qui était chargée de l’église. En fait, les fabriques n’ont jamais eu les disponibilités nécessaires pour les grosses réparations ; en fait, celles-ci étaient exécutées par les communes ; mais théoriquement la fabrique devait y suffire, et la commune n’arrivait qu’ensuite à titre subsidiaire.

Eh bien ! aujourd’hui, après la loi de Séparation, pouvons-nous imposer à la commune des charges plus lourdes qu’elle ne les connut jamais ?

Ah ! la grande faute, laissez-moi vous le dire, c’est le Gouvernement qui l’a commise (Interruptions à gauche), vous le savez bien comme moi, le jour où il a distribué aux communes les restes du budget des cultes sans conditions.

Je fais là allusion à un projet qui avait été déposé par MM. Briand, Caillaux et Clemenceau, et qui n’a pas été rapporté. Je crois bien qu’à cet instant nous avons passé à côté d’une solution assez satisfaisante. Mais allez donc reprendre aux communes ce qu’on leur a donné sans condition ! La commune dirait : « On m’a trompée. » Il n’y a pas aujourd’hui un gouvernement pour affronter cette mauvaise humeur, et je ne crois pas sage, pour aucun parti, de l’attirer sur lui et sur les églises.

Certes, je ne conteste pas que la commune ne soit intéressée à la conservation, au maintien, à la vie de l’édifice religieux ! C’est ma thèse, c’est mon sentiment le plus profond, c’est ma conviction raisonnée ; aussi faut-il que la commune puisse fournir autant que bon lui semblera sa contribution à l’église ; mais, à mon avis, sa libéralité doit être facultative ; je n’estime pas possible, ni historiquement, ni politiquement, de la rendre obligatoire.

Reste donc l’Etat.

L’Etat, en 1789, s’est approprié les biens qui servaient à l’entretien des églises. Cela lui crée une charge historique. Et puis c’est lui qui a la haute main pour veiller à la conservation des choses publiques. Spécialement, il préside aux grands intérêts historiques et artistiques du pays, à la haute vie morale de la nation. Il est le grand réparateur. A mon avis, c’est sur l’État que porte la principale responsabilité du sort de nos églises.