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REVUE SCIENTIFIQUE

LE QUART DE SIÈCLE DE L’INSTITUT PASTEUR

La mode est aux anniversaires. Noces d’argent, jubilés, centenaires, bi-centenaires même, célèbrent de toutes parts les événemens abolis et les hommes disparus. Jamais autant qu’aujourd’hui, on n’a eu le sentiment de cette solidarité qui, par-delà les siècles, nous lie invinciblement aux hommes et aux choses du passé ; jamais on n’a aussi bien senti que l’humanité est faite de beaucoup plus de morts que de vivans. Il y a quelque chose de curieux dans le culte que notre démocratie a pour ses souvenirs ; on ne trouverait certainement rien de comparable dans les siècles passés, et cela prouve peut-être que nous sommes en un sens plus traditionalistes qu’on ne l’a jamais été. Lorsque ces évocations sont celles d’hommes et d’œuvres trop oubliés ou qui ont eu leur heure, elles n’en sont que plus nobles en leur mélancolie, car elles fortifient dans la foule ces vertus trop rares : la reconnaissance et le culte des ancêtres. Mais, lorsqu’il s’agit de célébrer une date ancienne, et pourtant toujours vivante, une haute idée que les années ont vu fleurir toujours plus richement, une œuvre dont les ramifications se sont déployées sans fin depuis sa naissance, l’évocation prend un caractère triomphal et joyeux ; elle nous enseigne qu’un effort conduit par l’idéal peut avoir des effets d’une infinie durée, et qu’il ne faut jamais désespérer du progrès.

A cet égard, les noces d’argent de l’Institut Pasteur, célébrées récemment, ont été un des spectacles les plus réconfortans qui soient, car il n’en est peut-être pas, parmi les entreprises humaines, qui, en vingt-cinq siècles, aient fait autant que celle-ci fit en vingt-cinq ans