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REVUES ÉTRANGÈRES

UN ÉPISODE DE LA VIEILLESSE DE CASANOVA


Correspondance de Giacomo Casanova avec J. F. Opiz, publiée par Fr. Khol et Otto Pick, 2 vol. in-18, Leipzig, librairie Kurt Wolff, 1914.


L’inspecteur de finances autrichien J. F. Opiz avait beau faire profession de mépriser le « préjugé nobiliaire » presque autant que la « funeste superstition chrétienne : » rien au monde ne lui était plus agréable que de pouvoir se lier avec un grand seigneur. Aussi s’était-il empressé d’accepter et d’entretenir assidûment l’amitié un peu dédaigneuse qu’avait bien voulu lui offrir, en 1783, un vieux gentilhomme de son voisinage, le comte Maximilien de Lamberg, confiné désormais dans la solitude et l’ennui d’un coin perdu de Bohême, après avoir jadis fréquenté les plus fameux salons de l’Europe. Sur- le-champ, l’excellent Opiz avait entamé avec son nouvel ami une correspondance politique, scientifique, et philosophique, destinée à se poursuivre avec une régularité scrupuleuse pendant plus de dix ans. La copie, écrite de la propre main de cet infatigable « graphomane » au lendemain de la mort du vieux comte, remplit aujourd’hui, à la Bibliothèque de Prague, onze énormes volumes de format in-quarto.

Et comme notre inspecteur de finances, que sa profession condamnait à habiter obscurément la petite cité bohémienne de Czaslau, était avec cela à peine moins friand de connaître des « notabilités » de tout ordre que des membres authentiques de l’aristocratie, l’on se représentera aisément le plaisir que n’a pu manquer de lui causer, l’après-midi du 1er août 1785, la visite imprévue d’un voyageur italien que