Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/420

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

territoire égyptien. La longueur totale de la route côtière était de 1 240 milles, soit 1 836 kilomètres.

Une seconde route est celle dont nous avons déjà signalé l’existence le long du limes Tripolitain. Elle se détachait de la grande artère du littoral à Tacape, s’engageait dans l’intérieur parallèlement aux chotts el Djerid et el Fedjedj, contournait vers l’Ouest le massif des Matmata, suivait le rebord septentrional du Djebel Nefousa pour rejoindre Leptis Magna par la vallée de l’Oued Temsiouan. La valeur de cette route était surtout stratégique et militaire ; il s’agissait de relier entre elles les garnisons de la frontière, mais elle avait aussi une grande importance économique pour cette zone de peuplement considérable et de colonisation intense, qu’était, nous l’avons vu plus haut, la région du limes Tripolitain.

L’œuvre de romanisation s’est présentée dans des conditions absolument différentes en Tripolitaine et en Cyrénaïque. En Cyrénaïque, le problème se posait sous la même forme et avec la même ampleur que dans l’Orient hellénique tout entier : population, culture, langue, mœurs, tout était grec. Rome s’y trouvait en face d’une civilisation très ancienne et très raffinée. Elle a pu exercer une action administrative intense, agir sur les coutumes par la législation, perfectionner l’outillage économique du pays, elle n’a jamais pu le transformer à son image, comme elle l’a fait en Gaule, en Espagne, en Afrique même. Disons le mot : elle n’a jamais pu le romaniser. La langue latine y est toujours restée une étrangère.

En Tripolitaine, la situation était tout autre. Les villes phéniciennes ou puniques, îlots perdus dans un monde de nomades, livrées à leurs propres forces depuis la ruine de la métropole carthaginoise, offraient à l’influence romaine un terrain beaucoup plus favorable. Aussi, est-ce sur ce point que les Romains ont fait porter leur principal effort.

La romanisation en Tripolitaine, comme dans l’ensemble de l’Afrique du Nord, s’est manifestée essentiellement sous un triple aspect : développement des villes, diffusion de la langue latine, multiplication des travaux publics. Nous avons déjà eu l’occasion de noter le rôle décisif qu’avait joué l’élément urbain dans la romanisation du Maroc. Ce rôle est plus brillant encore en Tripolitaine, où les villes et leur banlieue immédiate constituaient les seuls centres de population sédentaire. Aussi le