Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 25.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les classes adonnées à l’industrie et au commerce, qui ne comprenaient qu’un tiers (35 pour 100) de la population allemande en 1850, étaient arrivées à en représenter plus de la moitié (53 pour 100) en 1871. La proportion de la population agricole, ainsi tombée en vingt et un ans de 65 à 47 pour 100, a naturellement continué à décroître : elle n’était plus que de 43 pour 100 en 1882, de 32 pour 100 en 1900, de 28 pour 100 en 1910. Son effectif numérique a baissé d’un million et demi, — de 19 millions 2 à 17 millions 7. — En France aussi, la population est beaucoup moindre qu’il y a cent ans dans tous les districts purement champêtres, bien qu’en bloc elle ait augmenté de moitié depuis 1814. Aussi bien serait-il naïf de se réjouir de ce que le machinisme réduise les frais de la main-d’œuvre, en supprimant des bras dans l’agriculture, et, ces bras une fois supprimés, de déplorer qu’il n’y ait plus autant de monde dans les campagnes.


III

Mais si l’importance relative de la classe rurale a diminué beaucoup plus en Allemagne, cela tient à ce que le chiffre global de sa population a presque triplé depuis un siècle. Remarquons-le bien : ce n’est pas du tout à la guerre heureuse pour elle de 1870 qu’est dû son accroissement de population ; et, du reste, on ne voit pas très bien comment le succès militaire pourrait influer sur la reproduction et déterminer des ménages précédemment stériles à procréer beaucoup d’enfans. Il y a juste cent ans (1815), l’Allemagne avait 23 millions d’habitans, la France en avait 27. En 1845, les deux pays possédaient le même effectif : 34 millions. En 1870, la France en avait seulement 37, l’Allemagne en avait 40.

Rien d’étonnant à ce qu’elle nous eût déjà dépassés : son chiffre annuel de naissances était de 1 233 000 en 1845, de 1 329 000 en 1860, de 1 511 000 en 1869 ; tandis qu’il demeurait chez nous, aux mêmes dates, stationnaire à 975 000 environ. Il est depuis quarante-quatre ans descendu graduellement en France jusqu’à 849 000 à la fin du XIXe siècle, jusqu’à 750 000 dans ces dernières années ; tandis qu’il avait, de 1901 à 1908, atteint en Allemagne 2 millions par an et qu’il y est encore de 1 870 000,