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1° L’addition d’un décime aux contributions existantes ne paraîtra certainement pas excessive aux Français, après les épreuves qu’ils viennent de traverser. Chacun de nous s’attend à ce que, à partir de 1916, la feuille du percepteur nous arrive avec une majoration : celle d’un dixième que nous suggérons est modérée. On remarquera que nous n’avons pas compris dans notre énumération les valeurs mobilières, qui viennent d’être lourdement frappées, et dont les coupons rapportent un ensemble de taxes amputant, dans certains cas, plus d’un sixième du revenu. Une taxe légère sur l’éclairage ne gênera point les consommateurs. Il n’y a pas bien longtemps, ils payaient à Paris le gaz 50 et l’électricité 300 pour 100 plus cher qu’aujourd’hui. Le doublement de la taxe sur les boissons dites hygiéniques est très justifiable et représentera bien peu de chose par rapport au déplacement de cours qui s’est produit depuis un certain nombre d’années. En quoi un droit de 3 francs par hectolitre, au lieu de 1 fr. 50, restreindra-t-il l’usage du vin, alors que le prix, qui en était de 5 ou 6 francs au commencement du siècle, a dépassé aujourd’hui 30 francs ?

2° Quant à l’alcool, sur lequel nous reviendrons plus longuement tout à l’heure, et à l’absinthe, dont les ravages sont un sujet d’effroi pour tout Français soucieux de l’avenir de son pays, nous ne savons pas si le doublement du droit que nous proposons est suffisant : il ne portera pas encore la taxe française à la hauteur de l’accise anglais. Nous avons admis, dans le calcul de son rendement, qu’il entraînerait une diminution notable de la consommation.

3° Si, comme nous voulons l’espérer, le privilège des bouilleurs de cru est enfin supprimé, nous sommes en droit de sup- poser que cette énorme consommation clandestine sera partiellement remplacée par une vente à ciel ouvert, qui acquittera les droits et augmentera d’autant le produit de l’alcool. En demandant le rétablissement de l’impôt sur les voyageurs à son taux antérieur, nous laissons indemnes la troisième classe, celle qui sert au plus grand nombre. Nous ne pensons pas que la proposition ainsi limitée soulève d’objection sérieuse.

4° Nous croyons le moment venu d’examiner dans son ensemble la question des chemins de fer. On sait quel est le régime bâtard sous lequel nous vivons. A côté du système originaire d’après lequel s’est constitué le réseau français, celui