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rembourser les traites acceptées par elles, dont des décrets successifs avaient retardé les échéances. Parmi ces effets, il s’en trouvait un grand nombre qui avaient été tirés par des banques étrangères, lesquelles éprouvaient de grandes difficultés à se procurer du change sur Paris. C’est ainsi que les blés russes ne sortent plus d’Odessa ni des autres ports de la mer Noire à cause de la fermeture des Dardanelles : dès lors, les exportateurs n’ont pas à leur disposition les sommes au moyen desquelles les établissemens moscovites s’acquittent en temps ordinaire de leurs dettes. De là la hausse du franc à Pétrograd, où le change sur Paris a passé de 265 à 220. Pour remédier à cet état de choses, une convention a été passée entre la Banque de France et la Banque de Russie, sous les auspices du Gouvernement impérial et avec le concours du Gouvernement français. Des accords analogues, mis à l’étude avec d’autres pays, également débiteurs du nôtre, auront pour effet de procurer à nos banques des remises de fonds de plus en plus abondantes, grâce auxquelles elles acquitteront une proportion croissante de leurs acceptations. La situation se dégagera ; le portefeuille de la Banque de France, qui, le 1er octobre, s’élevait à 4 476 millions, était tombé, le 10 décembre, à 3850 millions : plus de 600 millions d’effets avaient donc, dans l’intervalle, été acquittés entre ses mains. Ce mouvement continuera et, en dégageant la Banque centrale, lui rendra des forces qui lui permettront d’aider efficacement à la reprise des affaires.

Mais il ne suffit pas, pour que cette reprise ait lieu, que les engagemens du passé soient liquidés. Il faut, comme l’a dit excellemment M. Ribot dans son exposé soumis aux Chambres, mettre fin à cette sorte de paralysie qui frappe d’impuissance temporaire le grand organisme du crédit commercial, l’ensemble merveilleux de tous les moyens imaginés, perfectionnés au cours des siècles, sans lesquels le commerce et l’industrie n’auraient jamais pris le développement que l’on sait. Le producteur et le négociant ont besoin non seulement des fonds qu’ils peuvent avoir en dépôt dans les banques, mais de crédit pour l’achat des matières premières, pour les salaires des ouvriers, pour les transports. Ce crédit se donne par l’intermédiaire des banques : il faudrait que celles-ci ne craignissent pas, même en pleine guerre, de l’accorder aux maisons solvables, qui s’occupent d’affaires légitimes. Beaucoup de transactions