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parce que le cri « Vive l’Italie ! » était puni comme séditieux à Trieste, et le député Campi, dans cette même séance, déclara : « Nous conservons toujours au fond du cœur le souvenir et l’amour des autres Italiens qui ne sont pas encore réunis à la Patrie. »

L’Irrédentisme, dominant la question de l’alliance austro-italienne, va continuer ainsi à se trouver mêlé à la politique générale de l’Europe.

C’était pour le gouvernement italien une tradition, imposée par sa situation géographique, consacrée par l’histoire, d’entretenir des rapports d’amitié avec la Grande-Bretagne. Or les relations de cette dernière Puissance avec l’Allemagne se refroidissaient ouvertement et on pouvait prévoir qu’un jour viendrait où il faudrait choisir entre Londres et Berlin. L’évolution qui entraînait l’Italie vers la France et l’Angleterre, réconciliées désormais (avril 1904), ne devait pas manquer de favoriser le renouveau de l’agitation irrédentiste. En 1904, au moment du voyage à Rome du Président Loubet, les parlementaires français recevaient un album avec des vues de Trieste et des villes de l’Istrie, et la dédicace suivante aux anciens alliés de 1859 : « Trieste, souffrant sous le joug de l’Autriche, vous envoie son salut italien, dans l’espérance inébranlable que pour elle aussi finira par resplendir de toute sa lumière le soleil victorieux des plaines lombardes. »

L’année suivante, nouvelle manifestation, tombée cette fois du siège même du Président de la Chambre. Le 30 juillet 1905, M. Marcora, prononçant l’éloge funèbre du député Ettore Socci, évoqua le souvenir des luttes qu’il « avait soutenues avec Garibaldi dans notre Trentin. » Ces derniers mots furent couverts d’applaudissemens. Du Tyrol, de l’Istrie, comme de toute la Péninsule, les irrédentistes adressèrent des télégrammes de remerciemens pour Il Trentino nostro. Plusieurs autres petits froissemens, provoqués par l’irrédentisme, viennent aigrir encore les relations entre les deux Puissances alliées, incidens de frontière dans le Trentin, au Mont Toraro (1904), à la Cima Dodici, au Mont Mandirolo un peu plus tard.

Les rapports devinrent si tendus que les gouvernemens commencèrent à prendre des précautions militaires : en 4903, eurent lieu d’importantes manœuvres autrichiennes en Istrie auxquelles répondirent les manœuvres des corps italiens d’Udine, de Trévise