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Le Second Empire tomba sur ces entrefaites et tous les efforts de M. Visconti Venosta se concentrèrent dans des négociations rapides, que l’opinion publique italienne s’impatientait néanmoins de trouver si longues, pour obtenir du Gouvernement de la défense nationale la renonciation à la Convention de Septembre. Tant que cet abandon, prononcé enfin par M. Sénart dans la seconde décade de septembre, ne l’eut pas mis à l’abri du reproche de profiter des malheurs de la France, Visconti Venosta brava toutes les clameurs de la foule ameutée contre lui. Grâce à sa fermeté, que son collègue M. Castagnola eut l’air de dénoncer encore après trente ans, le couronnement de l’unité italienne se fit de l’aveu de la France. MM. de Choiseul et Fournier, qui représentèrent le Gouvernement de M. Thiers auprès du roi Victor-Emmanuel, reconnurent dans son ministre des Affaires étrangères un ami sincère de leur pays, profondément ému de ses malheurs. Si le souci des intérêts italiens obligea, après la guerre, le Cabinet de Rome à suivre l’évolution du comte de Beust vers l’Allemagne, il le fit avec une bien plus grande réserve. Les paroles définitives ne furent prononcées que plus tard, lorsque la chute de la Droite, consommée en 1876, avait mis fin au troisième ministère de Visconti Venosta. Revenu au pouvoir en 1896, il trouva l’Italie engagée à fond dans la voie des alliances avec les Empires de l’Europe centrale, doublée alors d’une entente avec l’Angleterre. Homme d’honneur et de patriotisme, ennemi des décisions précipitées, Visconti Venosta, ministre des Affaires étrangères dans les Cabinets présidés par le marquis de Rudini, le général Pelloux et le sénateur Saracco, respecta la lettre et l’esprit de ces engagemens ; mais il crut plus conforme aux origines et aux traditions de l’Italie, à ses intérêts aussi, de joindre à cette alliance essentiellement défensive et sans vue d’avenir des accords méditerranéens qui garantiraient les aspirations coloniales de la péninsule. Il commença par renouer patiemment le fil des négociations commerciales si douloureusement rompues à l’époque de Crispi. Il parvint à régler pour un temps la situation si délicate des nationaux italiens dans la régence de Tunis. Le couronnement de cette œuvre de rapprochement fut la signature du pacte réciproque par lequel l’Italie et la France reconnaissaient mutuellement la légitimité de leurs vues sur la Tripolitaine et sur le Maroc. Le marquis