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pendant ce temps, l’adversaire, — le torpilleur, dans l’espèce, ou le sous-marin, si celui-ci a un périscope de nuit, — ne laisse pas de marcher et de s’avancer. Tout au plus, de crainte de collision, réduit-il son allure. Un « Zeppelin » n’aura pas cette préoccupation. Nous savons d’ailleurs qu’il se dirige fort bien. Il conserve, à la boussole, un « cap » fixe. S’il est chargé par une brise fraîche venant du travers, il dérivera certainement, mais cette dérive peut être évaluée et, donc, corrigée par un changement de cap. C’est, au surplus, un cas particulier. Enfin le but qui lui est proposé ici est fixe, immobile, grand avantage pour l’assaillant. Un autre avantage est que ce but est très étendu, difficile à manquer. Quoi que l’on puisse faire, sur une immense ville comme Paris régnera toujours une lueur diffuse, dénonciation involontaire. Los points d’origine des faisceaux de lumière électrique donneraient encore des indications ; mais, dans le cas qui nous occupe, on éteindra ces inutiles projecteurs, et on fera bien.

Reste la surveillance des avions. C’est eux, justement, qui auront à prendre garde, étant plusieurs, à ne se point heurter. Dans cette atmosphère épaisse, chargée de poussières et de gouttelettes de vapeur, ces guetteurs aériens pourront-ils reconnaître à temps le dirigeable qui s’approche, tous feux masqués ? Ils entendront sans doute le bruit de ses moteurs ; mais sera-ce suffisant ? Le bruit fait par les moteurs de dirigeables est sensiblement plus faible que celui que produisent les moteurs d’aéroplanes. Ils attaqueront l’ennemi aussitôt reconnu. Seront-ils victorieux ?...

Je ne charge pas le tableau. Tout cela peut se produire. Il faut donc y songer, sans puéril émoi, puisque aussi bien c’est un assez faible danger pour chacun de nous que celui qui, se traduisant par la chute de quelques bombes, se répartit sur un si vaste espace et sur plus de trois millions de têtes. Paris, en 1870, subit sans sourciller de bien autres épreuves. Préoccupons-nous toutefois d’augmenter nos chances favorables d’échapper à celle-ci.

Or, supposons, — je reprends ma comparaison de tout à l’heure, — supposons qu’à ce navire obligé de rester à l’ancre, par temps bouché, la nuit, et qui redoute l’arrivée de torpilleurs ennemis, on vienne dire par la T. S. F. : « Le port d’où allaient partir ces torpilleurs vient d’être bombardé et ruiné. Ils sont eux-mêmes