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surveillance rigoureuse, qui en réduirait énormément les dangers au point de vue sanitaire.

Seulement, il faut, pour cela, que l’action de la police soit régularisée par la loi et qu’elle ne soit pas affaiblie ou énervée par les exigences de l’opinion, lui demandant une perfection irréalisable. Certes, les erreurs policières sont déplorables en cette matière, plus qu’en toute autre, et il faut tout faire pour les rendre aussi rares que possible. Mais il faut bien partir de cette idée, que la seule manière d’éviter les erreurs de la police, c’est de n’arrêter personne, de même que la seule manière d’éviter les erreurs judiciaires, c’est de ne condamner personne ; il semble parfois que ce soit vers ce remède, infiniment pire que le mal, que l’on s’achemine en France. On se rappelle les attaques auxquelles ont succombé jadis plusieurs chefs de la police, à Paris, à la suite d’erreurs du service des mœurs, dont beaucoup étaient plutôt des erreurs sur la nuance que sur le fond même de la conduite des personnes qui en étaient victimes. La conséquence en a été cet étalage du vice, qui y entraîne tant de jeunes gens, à un âge où ils n’ont pas plus la fermeté nécessaire pour résister aux provocations qu’ils n’auraient la hardiesse d’aller chercher la débauche, si elle ne venait pas au-devant d’eux ; de là tant de contaminations précoces, tant de vies détournées ensuite du mariage et de la famille par les mauvaises habitudes.

L’assainissement de la voie publique n’empêchera évidemment pas les hommes qui le voudront de trouver la satisfaction de leurs vices. Mais une surveillance vigilante de la police, soumettant toutes les formes de la prostitution aux visites sanitaires, diminuerait sans doute beaucoup les ravages des maladies qui en résultent.

A cet égard, il semble que, comme beaucoup de lois excellentes dans leur principe, celle du 11 avril 1908, soustrayant à l’action de la police les filles de moins de dix-huit ans, ait donné des résultats tout autres que ceux qu’on en attendait. Le retard que des prescriptions trop compliquées entraînent dans l’application des sanctions nécessaires et le défaut d’énergie et d’entente entre les autorités chargées de cette application ont abouti à une absence à peu près complète de surveillance sur ces filles ; plus séduisantes et moins expérimentées que les autres, elles sont le principal véhicule des maladies secrètes. Qu’on