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l’autre. » Il y avait donc une guerre de couloirs et on la poursuivait en même temps que l’autre ? Espérons que c’est fini.

Quant à M. Viviani, il n’avait jamais été mieux inspiré. Chaque phrase de son discours a été applaudie et méritait de l’être. Il a protesté une fois de plus contre toute paix prématurée et affirmé que nous ne pourrions songer à en faire une qu’après avoir assuré le triomphe du droit, brisé l’instrument du crime, restauré dans son intégrité territoriale l’héroïque Belgique et repris l’Alsace-Lorraine. C’est aussi La volonté de la Chambre et celle du pays. Tout est bien qui finit bien. Cette séance qui venait après deux autres mal engagées et mal conduites, était l’objet d’appréhensions légitimes : elle a assaini l’atmosphère et montré que si les couloirs parlementaires sont ce qu’a dit M. Varenne, la Chambre elle-même, prise dans son ensemble, a le sentiment des effrayantes responsabilités qui pèsent sur elle et s’arrête à temps au bord des fautes irréparables. Il vaudrait mieux, tout de même, s’arrêter un peu plus tôt.


Le Reichstag s’est ouvert, le 20 août, et sa première séance a été remplie par un grand discours de M. de Bethmann-Hollweg. Qui donc a dit que la répétition est la meilleure figure de rhétorique, la plus propre à entraîner la conviction ? Nul ne le croit plus fermement que le chancelier de l’Empire, et il rabâche à satiété les mêmes choses, ce qui est d’ailleurs une manière d’avouer qu’il a peu de confiance dans l’effet qu’elles ont produit jusqu’ici. Le remords chez lui devient volontiers agressif. On sent dans sa parole une impatience, un énervement, une irritation, une colère même de n’être pas cru ; peu à peu le ton s’en élève et devient de plus en plus violent. Cela plaît à son auditoire allemand et laisse le reste du monde tout à fait indifférent. M. de Bethmann-Hollweg perd son temps à raconter de nouveau à sa manière, qui est toujours la même, une histoire que tout le monde connaît : à notre tour, ce serait perdre le nôtre que de le suivre dans ces sentiers battus et rebattus. Qui ne sait aujourd’hui à quoi s’en tenir sur les origines de la guerre ? L’opinion est définitivement faite. Il faudrait, pour la changer, découvrir quelque fait nouveau qui changerait complètement la face des choses, et si ce fait existait, ce serait miracle qu’il fût encore ignoré.

M. de Bethmann-Hollweg a cru pourtant le trouver, il y a déjà quelques mois, lorsqu’il a lu, dans les papiers laissés à Bruxelles par le gouvernement, la mention d’une conversation sans autorité et sans portée qu’un colonel anglais aurait eue avec un général belge : il