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ces conditions doivent être exigées du candidat, si l’on veut qu’au profit de tous, le corps des masseurs aveugles maintienne l’excellente réputation qu’il était en voie de s’acquérir dans le monde médical et dans la clientèle. Le succès dépendra du bon choix des sujets. Quant à la profession de dactylo-sténographe, — déjà exercée par un aveugle, — elle offre cet intérêt de pouvoir tenter particulièrement nos officiers. Les résultats espérés de ce côté dépendent de la réalisation d’une machine adaptée aux conditions de travail des aveugles, machine dont, malheureusement, la guerre a interrompu la construction, au moment même où elle en faisait sentir plus vivement le besoin. Rien n’empêche que, quand il sera en mesure non plus seulement d’écrire à la vitesse de la parole, ce qui déjà est réalisé par la sténophile Bivort à l’usage des voyans, mais encore de relire ce qu’il aura écrit dans ces conditions, un aveugle puisse recueillir des conférences, des sermons, des plaidoyers ; qu’il puisse, dans des administrations ou dans de grandes maisons de commerce, avoir la charge de la correspondance, qu’il noterait à la sténographie, sous la dictée, pour la reporter ensuite en dactylographie.

Là encore, un choix rigoureux parmi les candidats est nécessaire. Ce soin et cette compétence qu’exige l’orientation rationnelle des aveugles tard venus à la cécité dans les nouvelles voies qui s’ouvrent à eux nous invitent à nous féliciter de la centralisation relative des services qui ont assumé la tâche de leur réadaptation. Trois organismes principaux, à l’heure actuelle, sont à signaler.

Le ministère de l’Intérieur a aménagé une annexe, des Quinze-Vingts, rue de Reuilly, où actuellement cent quarante soldats aveugles sont internés et rééduqués. Ils y reçoivent les leçons de maîtres, aveugles pour la plupart, parmi lesquels nous sommes heureux de constater la présence de quelques maîtres de l’Institution nationale des jeunes aveugles auxquels leur expérience assure une grande autorité. On ne saurait trop louer l’initiative qu’a prise là M. Brisac, le directeur de l’Assistance et de l’Hygiène au ministère de l’Intérieur. Il importait que, dès le début, les pouvoirs publics marquassent leur volonté de venir en aide à une catégorie de nos grands blessés, que la guerre avait si cruellement éprouvés, et nul abri n’était pour eux plus indiqué que cet établissement des Quinze-Vingts qui