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de se prémunir contre toutes les éventualités possibles, maintenant qu’elle est d’accord avec les Alliés sur la part qui doit lui revenir après la victoire commune. Sans doute elle ne pouvait pas agir seule, dans l’état d’isolement où l’avait provisoirement placée la retraite des Russes ; mais elle ne serait plus seule si le feu prenait aux Balkans. La Bulgarie arme, la Grèce arme, les Alliés ne resteront certainement pas des spectateurs inactifs du nouveau drame qui se prépare. Tant pis pour ceux qui, après avoir laissé échapper de bonnes occasions, ne se tiendraient pas prêts à profiter de celles qui peuvent encore se présenter demain.

Ce n’est pas à nous, à cette place, qu’il convient de faire un plan de campagne politique, et encore moins militaire. Bornons-nous à répéter que les heures sont précieuses et qu’elles passent vite. Le moment est venu de prendre à notre compte le langage que l’opposition bulgare a fait entendre au roi Ferdinand, avec le coefficient de sévérité qui résulte de notre force. Il faut toujours se garder d’adopter une attitude qu’on n’est pas matériellement à même de soutenir ; mais les moyens d’action ne manquent pas aux Alliés. Ils sont maîtres de la mer Egée et de la Mer-Noire. Enfin ils ont dans les Dardanelles une armée puissante, qui y a été envoyée pourquoi ? pour atteindre Constantinople et amener par-là, dans les Balkans, une situation politique dont nous aurions à tirer parti. Ce double but, nous devons continuer de le poursuivre avec une fermeté inébranlable ; seulement il y a plusieurs chemins pour y aboutir. Nous avons pris le plus difficile parce que nous respections la neutralité de la Bulgarie ; mais, si elle en sort elle-même, et elle en est déjà sortie par sa mobilisation, peut-être aura-t-elle simplifié notre tâche et les destinées s’accompliront autrement que nous ne l’avions prévu.

En attendant, les échos de l’Artois et de la Champagne se renvoient le bruit d’une canonnade qui est un peu plus sérieuse que celle de Semendria.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-Gérant, FRANCIS CHARMES.