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chambres de compensation des États non producteurs de coton pour 50 et les banques des États producteurs de coton pour 35 millions. Ces 135 millions étaient d’ailleurs loin de représenter la seule ressource mise à la disposition des États cotonniers. La Trésorerie avait déposé dans les banques des États du Sud 27 millions ; elle leur avait fourni 68 millions de billets de la circulation extraordinaire, elle aurait pu leur en donner encore 150 millions ; de ces divers chefs, près d’un quart de milliard était disponible. En outre, les banques de New-York avaient avancé à celles du Sud 40 millions de dollars. Peu à peu les exportations de coton reprirent un cours presque normal : ce qui ne fut pas envoyé en Allemagne et en Autriche fut dirigé vers des pays neutres, d’où il est d’ailleurs à supposer qu’il a trouvé un chemin jusque dans les empires du Centre de l’Europe.

Les tableaux douaniers publiés à cet égard sont instructifs. Ils ne laissent pas de doute sur la facilité avec laquelle nos ennemis ont pu s’approvisionner d’une matière indispensable à la fabrication des explosifs. Aussi l’Angleterre et la France se sont-elles enfin décidées, au mois d’août 1915, à déclarer le coton contrebande de guerre absolue, c’est-à-dire que leurs navires saisiront tous ceux qui transportent cette marchandise, quitte à indemniser les propriétaires des cargaisons.

Au début de l’année 1915, les menaces un moment suspendues sur le Nouveau-Monde étaient écartées. Le calme renaissait dans les esprits aussi bien que sur les marchés financiers et commerciaux. A mesure que le caractère de la lutte apparaissait et que la durée s’en prolongeait, les Américains virent s’ouvrir pour eux de multiples occasions d’exercer leur activité et de trouver, dans les fournitures à faire aux belligérans, des compensations au ralentissement de certaines industries dont les débouchés se rétrécissaient.

C’est surtout vers la France et l’Angleterre que les exportations ont pris, au cours de l’hiver et du printemps 1915, une allure qu’on peut qualifier de vertigineuse ; elles l’ont conservée au cours des mois d’été, dont l’influence est apparue d’une façon saisissante dans la cote des changes français et anglais, qui sont tombés aux cours les plus bas qui aient jamais été pratiqués : à Paris le dollar a été payé jusqu’au de la de 6 francs ; à Londres on n’obtint à un certain moment que moins que