Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce qu’il pensait des aumôniers d’hôpital, il le pensait aussi et il le disait des aumôniers de prison. Deux conceptions bien connues l’y ramenaient sans cesse. La première était que l’emprisonnement collectif ou la détention en commun sont des instrumens de corruption, que tous les projets de peines accomplies dans un état de demi-liberté, comme dans les anciens bagnes ou dans les pénitenciers agricoles, sont autant d’expériences horriblement coûteuses et très décevantes. Son enquête sur les pénitenciers de la Corse au nom de la Commission de l’Assemblée nationale peut, à cet égard, servir de modèle. La seconde conception, — celle, au reste, de tous les hommes qui ont bien voulu étudier la question tout entière, — c’était que le patronage est pour la société une condition indispensable de relèvement pour les coupables et de sécurité, — relative, — pour la société. Il tenait tellement à l’exercice du patronage, lui l’un des fondateurs, l’un des présidens et à la fois le soutien presque unique du patronage des libérés adultes, qu’il voulait qu’on l’exerçât, comme on pût, sous tous les régimes ; mais il était bien d’avis que le régime qui devait provoquer le moins d’in- succès était celui de l’emprisonnement individuel. Le jour où il avait combattu pour la réforme de la loi sur la surveillance des grands condamnés, il avait fait cette réserve, que la surveillance bienveillante des institutions de charité et des sociétés de patronage vaudrait encore mieux que la surveillance ou excessive ou inégale de la police ; mais il ajoutait : « Seulement, croyez-vous que ce soit par décret qu’on improvise la charité et le dévouement ? » C’est pourquoi il voulait au moins qu’on honorât et qu’on facilitât ce patronage élémentaire, en quelque sorte, toujours dû, toujours prêt, des aumôniers des prisons.


La complexité et aussi l’harmonie de ces efforts nous préparent à bien comprendre comment, partout, M. Bérenger voulut unir une répression plus vigilante et plus ferme et un ensemble de mesures destinées à « assister » non seulement les victimes du mal, mais les auteurs mêmes du mal.

Nous arrivons en effet ici à la dernière partie de sa carrière et de ses propagandes, a sa lutte contre l’immoralité, contre ses causes, contre ses manifestations, contre ses suites variées.