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puissance totale de feu, c’est-à-dire à des besoins d’approvisionnement qui dépasseront de loin ce que nous voyons aujourd’hui et qui nécessiteront une immense organisation de convois et de moyens d’accès. Il faut cependant noter que le nombre croissant des pièces n’entraîne pas forcément une consommation proportionnelle. Souvent, il a pour principal effet de permettre une concentration dans le temps : on dépense en quelques minutes les munitions qu’on eût dépensées en quelques heures, parfois on en dépense moins ; elles sont employées simultanément, au lieu de l’être successivement ; le résultat, plus foudroyant, est plus complet, non pas plus coûteux. Les pièces se taisent plus longtemps : elles attendent leur heure et ne frappent qu’au bon moment. Mais il faut de plus grands stocks.

On est descendu plus bas encore dans l’allégement de la machine à tuer. On a fait un instrument plus maniable que la mitrailleuse, intermédiaire entre elle et le fusil, le fusil mitrailleur, qui est un fusil automatique. C’est la forme offensive de la mitrailleuse. Pesant sept ou huit kilogrammes, le double seulement du fusil ordinaire, se posant par le canon sur une fourche et s’épaulant, au besoin accroché à l’épaule dans un étrier, emporté par le tireur dans les tranchées ennemies, le fusil mitrailleur semble être le fusil de l’avenir. Il sera capable d’arroser le terrain d’un demi-millier de balles par minute. La difficulté étant de porter les cartouches et d’alimenter la machine, sans doute n’y aura-t-il qu’un fusil par deux ou trois hommes.

Sans doute aussi admettra-t-on une nouvelle réduction du calibre. En l’amenant de 1) à 7 millimètres, le fusil Lebel avait fait un pas hardi dans la voie de l’allégement, utile contrepartie du tir rapide. L’abondance des canons légers, comme notre 75, la puissance et la rapidité de leur action contre l’infanterie, la création peut-être d’une mitrailleuse de fort calibre, ne dispenseront-ils pas de l’emploi du fusil aux distances supérieures à 1 000 ou 1 200 mètres ? On pourrait alors s’en tenir à un fusil mitrailleur de 4 ou 5 millimètres de diamètre, peut-être moins, si l’on obtient un métal plus lourd pour la balle el de plus grandes vitesses initiales. On lancerait des fléchettes minuscules, ne produisant que de toutes petites blessures, anodines là où elles ne toucheront pas à un point vital, mais suffisantes pour mettre l’homme hors de combat.