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REVUE LITTÉRAIRE

ANDRÉ CHÉNIER[1]

Il aura fallu beaucoup plus d’un siècle pour que nous fût donnée l’œuvre complète de Chénier ; mais enfin nous l’aurons bientôt. Quand il est mort, il n’avait publié que son Jeu de Paume et l’Hymne aux Suisses de Châteauvieux, en fait de poèmes. Après cela, et jusqu’en 1819, on n’a connu de lui que la Jeune captive, la Jeune Tarentine et de courts fragmens que Chateaubriand, Millevoye et un certain Fayolle ont cités. Chateaubriand raconte, dans le Génie du Christianisme, qu’il a eu entre les mains un petit recueil d’idylles manuscrites, de cet « infortuné jeune homme, » et qu’il y a trouvé « des choses dignes de Théocrite. » On aime à se figurer que ce cahier précieux appartenait à Pauline de Beaumont, laquelle, par son cousin François de Pange, fut l’amie d’André Chénier ; elle était aussi l’amie de Mme Lecoulteux, Fanny peut-être…


Fanny, l’heureux mortel qui près de toi respire
Sait, à te voir parler, et rougir, et sourire,
De quels hôtes divins le ciel est habité…


Et c’est dans la fine et amoureuse compagnie de Pauline de Beaumont que Chateaubriand composa son apologie chrétienne. Cette charmante femme qui allait mourir a transmis au splendide poète du siècle commençant la jeune poésie qu’avait tuée le siècle terrible.

  1. Nouvelles éditions. — Œuvres inédites d’André Chénier, publiées d’après les manuscrits originaux par Abel Lefranc (librairie Champion) ; — Œuvres complètes d’André Chénier : tome I, Bucoliques et, tome II, Poèmes, Hymnes, Théâtre (librairie Delagrave).