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durèrent plusieurs jours ; 300 habitans, dont une trentaine de prêtres, furent déportés en Allemagne. Et il faut lire le rapport de l’un d’eux, le R. P. Goovaerts, pour avoir une idée des souffrances atroces qu’on leur fît endurer !

Aux environs immédiats d’Aerschot, les atrocités furent égales : pour la seule commune de Gelrode on compte, pour une population de moins de mille habitans, 18 tués, 99 déportés, 23 maisons incendiées, 131 pillées. A Wesemael, 13 tués, 324 déportés. A Werchter, 15 tués, 32 déportés, 267 maisons incendiées, 162 pillées, etc.

A Andenne-Seilles, autre petite ville de 7 800 habitans située sur la Meuse, les pillages, incendies, massacres et cruautés furent horribles : non loin de 300 victimes, environ 200 maisons pillées ; nulle autre ville ne fut le théâtre d’autant de scènes de férocité. Sur un cas d’une telle gravité, le Livre Blanc produit en tout et pour tout trois témoignages, ceux d’un général, d’un major et d’un simple soldat. Or, le général ne parle que par ouï-dire, et les allégations du major sont manifestement mensongères (il affirme que 100 soldats auraient été échaudés avec de l’eau bouillante, alors que pas une des victimes et pas un médecin ne témoignent à ce sujet). D’autre part, le Livre Blanc ne craint pas de reprendre des assertions démenties par les enquêtes allemandes elles-mêmes. Enfin, il fait état d’une enquête tardive menée par le sous-lieutenant Götze et qui n’a été qu’une comédie judiciaire. Huit jours après le massacre, le commandant d’Andenne invita l’administration communale et certains habitans à une réjouissance publique sur la place même où avaient eu lieu les massacres !...

A Dinant, la statistique du carnage est affreuse. La liste des cadavres identifiés est reproduite par le Livre Gris : un à un, comme à un appel de vivans, 606 morts se relèvent de la fosse commune pour accuser leurs bourreaux. Parmi les victimes : 71 personnes du sexe féminin, 34 personnes dépassant l’âge de soixante-dix ans et 66 enfans et adolescens de moins de dix-huit ans et dont le plus jeune avait trois semaines. Dinant comptait 7 700 habitans, dont il restait peut-être quelque 4 000 sur la rive droite de la Meuse, lors de l’arrivée des Allemands, le reste ayant pris la fuite ; sur 1 450 maisons, 1 263 furent incendiées ; 416 habitans de toutes les classes sociales furent déportés et détenus de longs mois en Allemagne : M. Tschoffen,